fin que c'etoit fait,
Car il ne restoit en effet,
Que la pauvre Peau d'Asne au fond de la cuisine,
Mais comment croire, disoit-on,
Qu'a regner le Ciel la destine,
Le Prince dit, & pourquoi non?
Qu'on la fasse venir. Chacun se prit a rire
Criant tout haut que veut-on dire,
De faire entrer ici cette sale guenon
Mais lorsqu'elle tira de dessous sa peau noire
Une petite main qui sembloit de l'yvoire,
Qu'un peu de pourpre a colore,
Et que de la bague fatale,
D'une justesse sans egale
Son petit doigt fut entoure,
La Cour fut dans une surprise
Qui ne peut pas etre comprise.
On la menoit au Roi dans ce transport subit,
Mais elle demanda qu'avant que de paraitre
Devant son Seigneur & son Maitre
On lui donnat le temps de prendre un autre habit,
De cet habit, pour la verite dire,
De tous cotez on s'appretoit a rire,
Mais lorsqu'elle arriva dans les Appartemens
Et qu'elle eut traverse les salles
Avec ses pompeux vetemens
Dont les riches beautez n'eurent jamais d'egales,
Que ses aimables cheveux blonds
Melez de diamans dont la vive lumiere
En faisoit autant de rayons,
Que ses yeux bleus, grands, doux & longs,
Qui pleins d'une Majeste fiere
Ne regardent jamais sans plaire & sans blesser,
Et que sa taille enfin si menuee & si fine
Qu'avecque ses deux mains on eut pu l'embrasser,
Montrerent leurs appas & leur grace divine;
Des Dames de la Cour, & de leurs ornemens
Tomberent tous les agremens.
Dans la joye & le bruit de toute l'Assemblee,
Le bon Roi ne se sentoit pas
De voir sa Bru posseder tant d'appas,
La Reyne en etoit affolee,
Et le Prince son cher Amant,
De cent plaisirs l'ame comblee
Succomboit sous le poids de son ravissement.
Pour l'Hymen aussitot chacun prit ses mesures,
Le Monarque en pria tous les Rois d'alentour,
Qui tous brillans de diverses parures
Quitterent leurs Etats pour etre a ce-grand jour
On en vit arriver des climats de l'Aurore,
Montez sur de grands Elephans,
Il en vint du rivage More,
Qui plus noirs & plus laids encore,
Faisoient peur aux petits enfans;
Il en debarque & la Cour en abonde.
Mais nul Prince, nul Potentat,
N'y parut avec tant d'eclat
Que le Pere de l'Epousee,
Qui d'elle au
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