non pour les prochaines elections, c'est
trop tot, mais pour un temps qui n'est pas si eloigne qu'on le croirait,
a ne voir que la surface des choses.
Courage donc! L'humanite gagnera son proces. Je n'ai pas besoin de vous
dire que j'ai suivi vos persecutions et votre espece d'_acquittement_
avec le plus vif interet. Vous ne doutez pas de mes sentiments pour
vous et de l'encouragement fraternel que je voudrais vous apporter sans
cesse, si, Dieu merci, cela ne vous etait point parfaitement inutile,
puisque vous avez la perseverance et la foi plus que personne.
Tout a vous de coeur.
G. SAND.
Mon fils se rappelle a votre souvenir.
CCCXVI
A MAURICE SAND, A PARIS
Nohant, 13 mai 1849.
Mon enfant,
Je crois que tu devrais revenir sauf a retourner ensuite s'il ne se
passe rien de tout ce que le monde apprehende. Je ne m'inquiete pas
follement; mais je vois bien que la situation est plus tendue qu'elle
ne l'a jamais ete, et, non seulement par les journaux, mais encore par
toutes les lettres que je recois, je vois que le pouvoir veut absolument
en venir aux mains. Il fera de telles choses que le peuple, qui est
un etre collectif et un compose de mille idees et de mille passions
diverses, ne pourra probablement continuer ce miracle de rester calme
et uni comme un seul homme en presence des provocations insensees d'une
faction qui joue son va-tout. La lutte sera terrible; il y a tant de
partis ennemis les uns des autres qu'on ne peut en prevoir l'issue, et
qu'il y aura peut-etre de plus horribles meprises, s'il est possible,
de plus sanglants malentendus qu'en juin. Si la Republique rouge donne,
elle donnera jusqu'a la mort; car c'est la Republique europeenne qui est
en jeu avec elle contre l'absolutisme europeen. Voila du moins ce que
je crois, et cela peut eclater d'un moment a l'autre. Tu ne lis pas les
journaux peut-etre; mais, si tu suivais les discussions orageuses de
l'Assemblee, tu verrais que chaque jour, chaque heure fait naitre un
incident qui est comme un brandon lance sur une poudriere.
Reviens donc, je t'en prie; car je n'ai que toi au monde, et ta fin
serait la mienne. Je peux encore etre d'une petite utilite a la cause de
la verite; mais, si je te perdais, bonsoir la compagnie! Je n'ai pas le
stoicisme de Barbes et de Mazzini. Il est vrai qu'ils sont hommes et
qu'ils n'ont pas d'enfants. D'ailleurs, selon moi, ce n'est point par le
combat, par la guerre ci
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