t une enfance[151]
a moi que de le renvoyer sur un pareil soupcon. Est-ce qu'on ne peut me
voir sans m'aimer? Je n'y saurois que faire; il faut bien m'y accoutumer,
et prendre mon parti la-dessus. Vous lui trouvez l'air galant, dites-vous?
Je n'y avois pas pris garde, et je ne lui en ferai point un reproche. Il y
auroit de la bizarrerie a se facher de ce qu'il est bien fait. Je suis
d'ailleurs comme tout le monde: j'aime assez les gens de bonne mine.
SCENE VII.
ARAMINTE, Mme. ARGANTE, M. REMY, LE COMTE, DORANTE.
DORANTE.
Je vous demande pardon, Madame, si je vous interromps. J'ai lieu de
presumer que mes services ne vous sont plus agreables, et, dans la
conjoncture presente, il est naturel que je sache mon sort.
Mme. ARGANTE, _ironiquement_.
Son sort! Le sort d'un intendant: que cela est beau!
M. REMY.
Et pourquoi n'auroit-il pas un sort?
ARAMINTE, _d'un air vif, a sa mere_.
Voila des emportements qui m'appartiennent. (_A Dorante._) Quelle est
cette conjoncture, Monsieur, et le motif de votre inquietude?
DORANTE.
Vous le savez, Madame. Il y a quelqu'un ici que vous avez envoye chercher
pour occuper ma place.
ARAMINTE.
Ce quelqu'un-la est fort mal conseille. Desabusez-vous: ce n'est point moi
qui l'ai fait venir.
DORANTE.
Tout a contribue a me tromper, d'autant plus que mademoiselle Marton vient
de m'assurer que dans une heure je ne serois plus ici.
ARAMINTE.
Marton vous a tenu un fort sot discours.
Mme. ARGANTE.
Le terme est encore trop long: il devroit en sortir tout a l'heure.[152]
M. REMY, _comme a part_.
Voyons par ou cela finira.
ARAMINTE.
Allez, Dorante, tenez-vous en repos; fussiez-vous l'homme du monde qui me
convint le moins, vous resteriez; dans cette occasion-ci, c'est a moi-meme
que je dois cela; je me sens offensee du procede qu'on a avec moi, et je
vais faire dire a cet homme d'affaires qu'il se retire; que ceux qui l'ont
amene, sans me consulter, le remmenent, et qu'il n'en soit plus parle.
SCENE VIII.
ARAMINTE, Mme. ARGANTE, M. REMY, LE COMTE, DORANTE, MARTON.
MARTON, _froidement_.
Ne vous pressez pas de le renvoyer. Madame; voila une lettre de
recommandation pour lui, et c'est monsieur Dorante qui l'a ecrite.
ARAMINTE.
Comment!
MARTON, _donnant la lettre au Comte_.
Un instant, Madame, cela merite d'etre ecoute; la lettre est de Monsieur,
vous dis-je.
LE COMTE _lit haut_.
_Je vous conjure, mon cher ami, d'etre demain s
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