rassez pas, ce sont mes affaires.
DUBOIS.
En un mot, vous en etes quitte, et cela par le moyen de cette lettre qu'on
vous a lue, et que mademoiselle Marton a tiree d'Arlequin par mon avis. Je
me suis doute qu'elle pourrait vous etre utile, et c'est une excellente
idee que j'ai eue la, n'est-ce pas, Madame?
ARAMINTE, _froidement_.
Quoi! c'est a vous que j'ai l'obligation de la scene qui vient de se
passer?
DUBOIS, _librement_.
Oui, Madame.
ARAMINTE.
Mechant valet, ne vous presentez plus devant moi.
DUBOIS, _comme etonne_.
Helas! Madame, j'ai cru bien faire.
ARAMINTE.
Allez, malheureux! Il falloit m'obeir; je vous avois dit de ne plus vous
en meler: vous m'avez jetee dans tous les desagrements que je voulois
eviter. C'est vous qui avez repandu tous les soupcons qu'on a eus[158] sur
son compte, et ce n'est pas par attachement pour moi que vous m'avez
appris qu'il m'aimoit: ce n'est que par le plaisir de faire du mal. Il
m'importoit peu d'en etre instruite: c'est un amour que je n'aurois jamais
su, et je le trouve bien malheureux d'avoir eu affaire a vous, lui qui a
ete votre maitre, qui vous affectionnoit, qui vous a bien traite, qui
vient, tout recemment encore, de vous prier a genoux de lui garder le
secret. Vous l'assassinez, vous me trahissez moi-meme: il faut que vous
soyez capable de tout. Que je ne vous voie jamais, et point de replique.
DUBOIS, _s'en va en riant_.
Allons, voila qui est parfait.
SCENE X.
ARAMINTE, MARTON.
MARTON, _triste_.
La maniere dont vous m'avez renvoyee il n'y a qu'un moment me montre que
je vous suis desagreable, Madame, et je crois vous faire plaisir en vous
demandant mon conge.
ARAMINTE, _froidement_.
Je vous le donne.
MARTON.
Votre intention est-elle que je sorte des aujourd'hui, Madame?
ARAMINTE.
Comme vous voudrez.
MARTON.
Cette aventure-ci est bien triste pour moi!
ARAMINTE.
Oh! point d'explication, s'il vous plait.
MARTON.
Je suis au desespoir!
ARAMINTE, _avec impatience_.
Est-ce que vous etes fachee de vous en aller? Eh bien! restez,
Mademoiselle, restez: j'y consens; mais finissons.
MARTON.
Apres les bienfaits dont vous m'avez comblee, que ferois-je aupres de vous
a present que je vous suis suspecte, et que j'ai perdu toute votre
confiance?
ARAMINTE.
Mais que voulez-vous que je vous confie? Inventerai-je des secrets pour
vous les dire?
MARTON.
Il est pourtant vrai que vous me renvoyez,
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