ante et
acharnee. Oh! que celui qui n'a jamais senti sur sa bouche le
baiser profond d'une femme prete, a se donner, me jette la premiere
pierre....
... Enfin, une minute de plus... vous comprenez, n'est-ce pas? Une
minute de plus et... j'etais... non, elle etait... pardon, c'est lui
qui l'etait!... ou plutot qui l'aurait ete, quand voila qu'un bruit
terrible nous fit bondir.
La buche, oui, la buche, madame, s'elancait dans le salon, renversant
la pelle, le garde-feu, roulant comme un ouragan de flamme, incendiant
le tapis et se gitant sous un fauteuil qu'elle allait infailliblement
flamber.
Je me precipitai comme un fou, et pendant que je repoussais dans la
cheminee le tison sauveur, la porte brusquement s'ouvrit! Julien, tout
joyeux, rentrait. Il s'ecria: "Je suis libre, l'affaire est finie deux
heures plus tot!"
Oui, mon amie, sans la buche, j'etais pince en flagrant delit. Et vous
apercevez d'ici les consequences!
Or, je fis en sorte de n'etre plus repris dans une situation pareille,
jamais, jamais. Puis je m'apercus que Julien me battait froid, comme
on dit. Sa femme evidemment sapait notre amitie; et peu a peu il
m'eloigna de chez lui; et nous avons cesse de nous voir.
Je ne me suis point marie. Cela ne doit plus vous etonner.
LA RELIQUE
_Monsieur l'abbe Louis d'Ennemare, a Soissons._
Mon cher abbe,
Voici mon mariage avec ta cousine rompu, et de la facon la plus bete,
pour une mauvaise plaisanterie que j'ai faite presque involontairement
a ma fiancee.
J'ai recours a toi, mon vieux camarade, dans l'embarras ou je me
trouve; car tu peux me tirer d'affaire. Je t'en serai reconnaissant
jusqu'a la mort.
Tu connais Gilberte, ou plutot tu crois la connaitre; mais connait-on
jamais les femmes? Toutes leurs opinions, leurs croyances, leurs
idees sont a surprises. Tout cela est plein de detours, de retours,
d'imprevu, de raisonnements insaisissables, de logique a rebours,
d'entetements qui semblent definitifs et qui cedent parce qu'un petit
oiseau est venu se poser sur le bord d'une fenetre.
Je n'ai pas a t'apprendre que ta cousine est religieuse a l'extreme,
elevee par les Dames blanches ou noires de Nancy.
Cela, tu le sais mieux que moi. Ce que tu ignores, sans doute, c'est
qu'elle est exaltee en tout comme en devotion. Sa tete s'envole a la
facon d'une feuille cabriolant dans le vent; et elle est femme, ou
plutot jeune fille, plus qu'aucune autre, tout de suite attendrie ou
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