a tete.
--Que Dieu t'entende, ma chere fille bien-aimee! Qu'il nous reunisse un
jour pour ne jamais nous quitter!
Le courage de Christine excita celui de Francois; quand M. de Nance vit
ses enfants plus calmes, son propre chagrin devint moins amer. Il entra
dans quelques details sur leur existence future, encore animee par
l'espoir de la reunion.
CHRISTINE
--Quand j'aurai vingt et un ans, mon pere, je pourrai disposer de
moi-meme; je viendrai alors chercher un refuge pres de vous, et nous
jouirons d'autant mieux de notre bonheur que nous en aurons ete prives
pendant... cinq ans.
--Cinq ans! s'ecria Francois. Oh! Christine serons-nous reellement cinq
ans separes?
M. DE NANCE
--Qui sait ce qui peut arriver mon ami? Peut-etre nous retrouverons-nous
bien plus tot.
CHRISTINE
--Vous m'ecrirez bien souvent, n'est-ce pas, mon pere? n'est-ce pas
Francois?
FRANCOIS
--Tous les jours! Un jour mon pere, et moi l'autre.
CHRISTINE
--Et moi de meme, si on me le permet a ce couvent; on y est peut-etre
tres severe.
M. DE NANCE
--Non, ma fille; la superieure est une ancienne amie de ma femme; elle
est excellente et te donnera toute la liberte possible; c'est pour cette
raison que j'ai indique ce couvent a ta mere, de peur qu'elle ne te
placat dans quelque maison inconnue et eloignee. Ici, du moins, tu auras
ta tante de Cemiane, qui revient a la fin de l'annee, apres une absence
de six ans.
CHRISTINE
--Oui, mon pere, Gabrielle m'a ecrit que ma tante etait tout a fait
remise depuis les deux ans qu'elle a passes a Madere. Et vous, mon pere,
vous serez bien loin avec Francois?
M. DE NANCE
--Dans le Midi, chere enfant, pres de Pau, ou Francois finira ses
etudes, Nous reviendrons dans deux ans avec le bon Paolo, que j'emmene.
CHRISTINE
--Bon Paolo! lui aussi! Plus personne!
M. DE NANCE
--Isabelle, seule, te restera, ma fille; et nos coeurs seront toujours
pres de toi.
Les journees passerent vite et tristement; Paolo partageait les chagrins
de Christine; il cherchait a relever son courage.
PAOLO
--Cere signorina, prenez couraze! Vous serez heureuse; c'est moi, Paolo,
qui le dis.
CHRISTINE
--Heureuse! Sans eux, c'est impossible!
PAOLO
--Avec eux! Que diable! deux ans sont bien vite passes!... Deux ans, ze
vous dis.
Christine secoua la tete.
PAOLO
--Vous remuez la tete comme une cloce; et moi ze vous dis que ze sais
ce que ze dis, et que dans deux ans vous ferez
|