Vous allez voir! En route,
cocer! et marcez vite!
La voiture roula, s'eloigna et disparut. La tristesse et la desolation
regnerent a Nance comme au coeur des maitres. Le voyage se fit et
s'acheva rapidement; mais, ni l'aspect d'un pays nouveau, ni les
agrements d'une habitation charmante, ni les distractions d'un nouvel
etablissement ne purent dissiper la morne tristesse de Francois et de M.
de Nance. Paolo reussit pourtant quelquefois a les faire sourire en leur
parlant de Christine, en racontant des traits de son enfance. Tous les
jours arrivait une lettre de Christine, et tous les jours il en partait
une pour elle. Peu de temps apres leur arrivee dans les environs de Pau,
un espoir fonde vint ranimer le coeur et l'esprit de Francois et de
son pere; chaque jour augmentait leur securite; quelle etait cette
esperance? Nous ne la connaissons pas encore, mais nous pensons qu'une
indiscretion de Paolo ou la suite des evenements nous la revelera un
jour. L'attitude de Paolo est triomphante; son langage est mysterieux
comme ses allures. M. de Nance parait heureux; il ne s'attriste plus en
nommant Christine, pour laquelle il eprouve une tendresse de plus en
plus vive. Mais il ne lui echappe aucune parole qui puisse expliquer le
changement qui se fait en lui. Francois aussi cause plus gaiement; il
ne parle que de Christine et d'un heureux avenir. Leur correspondance
continue active et affectueuse. Paolo meme ecrit et recoit des lettres.
Les mois se passent, les annees de meme; enfin, apres deux annees de
sejour a Pau, un jour, apres avoir recu une lettre de Christine et de
Mme de Cemiane et en avoir longuement cause avec son pere, Francois lui
dit:
--Mon pere, pouvons-nous parler a Christine aujourd'hui? Je suis si
malheureux loin d'elle!
--Oui, mon ami, nous le pouvons. Paolo vient tout juste de me dire qu'il
m'y autorisait et qu'il repondait de toi sur sa tete.
Francois serra vivement la main de son pere et le quitta en disant:
--Mon pere, ecrivez et faites des voeux pour moi; j'ai peur.
--Je suis fort tranquille, moi, mon ami; comment pouvons-nous douter de
ce coeur si rempli de tendresse?"
M. de Nance n'etait pourtant pas aussi calme qu'il le disait; quand
Francois fut parti, il se promena longtemps avec agitation dans sa
chambre et relut plusieurs fois la lettre de Christine. Puis il se mit a
ecrire lui-meme. Pendant qu'il etait ainsi occupe, nous allons savoir ce
qu'avait fait et pense Christine pendant c
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