ter notre
conversation. Au revoir, ma petite Christine; va faire ta lettre pendant
que j'ecrirai la mienne.
C'etait cette lettre de Christine avec celle de sa tante que M. de Nance
lisait et a laquelle il repondait a la priere de Francois.
Peu de jours apres cette demande d'Adolphe, Christine recut la reponse
qu'elle attendait avec impatience; c'etait bien M. de Nance qui
repondait. Elle baisa la lettre avant de la commencer, et lut ce qui
suit:
--Ma fille, ma bien-aimee Christine, mon Francois, ton frere, ton ami,
ne se sent plus le courage de vivre loin de toi; il traine ses tristes
journees sans but et sans plaisir; moi-meme, malgre mes efforts pour
dissimuler mon chagrin, je souffre comme lui de ton absence. Et toi,
ma Christine, tu es malheureuse, je le sens, j'en suis sur; toutes tes
lettres en font foi, malgre tes efforts pour paraitre calme et gaie,
Francois me sollicite aujourd'hui de te demander si tu veux mettre un
terme a notre separation? Car de toi, de ta volonte, ma Christine,
depend tout notre bonheur a venir. Tu t'etonnes que j'aie l'air de
douter de cette volonte: mais laisse-moi te dire a quel prix, par quel
sacrifice peut s'operer notre reunion. J'ose a peine te l'ecrire, ma
chere enfant, si devouee, si aimante!... Veux-tu devenir ma vraie
fille en devenant la femme de mon Francois? Veux-tu consacrer ta belle
jeunesse, ta vie, au bonheur d'un pauvre infirme, vivre avec lui loin
du monde et de ses plaisirs, t'exposer aux cruelles plaisanteries que
provoque son infirmite? La vie sera pour toi serieuse et monotone, elle
se continuera entre moi et ton frere: notre tendresse en sera le
seul embellissement, la seule distraction. J'attends ta reponse, ma
Christine, avec une anxiete que tu comprendras facilement, puisque notre
bonheur en depend. Ce qui me donne du courage et l'espoir, c'est ce que
tu nous dis aujourd'hui de la demande d'Adolphe, de ton refus et de ses
motifs, qui nous ont remplis d'esperance, etc., etc. Christine eut de la
peine a lire cette lettre jusqu'au bout, tant ses yeux obscurcis par les
larmes dechiffraient peniblement l'ecriture si connue et si chere de son
pere. Quand elle l'eut finie, son premier mouvement fut de se jeter au
pied de son crucifix et de remercier Dieu du bonheur qu'il lui envoyait.
Ensuite elle courut chez Isabelle, et, se jetant a son cou, elle lui
remit la lettre de M. de Nance en lui disant:
--Lisez, lisez, Isabelle; voyez ce que me demande mon pere. Cher
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