uses; ce paradis qui, dit-il,
est au commencement de la terre et place si haut qu'il touche de pres la
lune; enfin mille autres impostures ou sottisses de meme espece, qui
denotent non l'erreur de la betise et de la credulite, mais le mensonge de
la reflexion et de la fraude?
Je regarde meme comme tels, ces trente-cinq ans qu'il dit avoir employes a
parcourir le monde sans avoir songe a revenir dans sa patrie que quand
enfin la goute vint le tourmenter.
Quoiqu'il en existe trois editions imprimees, l'une en 1487 chez Jean Cres,
l'autre en 1517 chez Regnault, la troisieme en 1542 chez Canterel, on ne le
connoit guere que par le court extrait qu'en a publie Bergeron. Et en effet
cet editeur l'avoit trouve si invraisemblable et si fabuleux qu'il l'a
reduit a douze pages quoique dans notre manuscrit il en contienne cent
soixante et dix-huit.
Dans le quinzieme siecle, nous eumes deux autres voyages en Terre-Sainte:
l'un que je publie aujourd'hui; l'autre, par un carme nomme Huen, imprime
en 1487, et dont je ne dirai rien ici, parce qu'il est posterieur a
l'autre.
La meme raison m'empechera de parler d'un ouvrage mis au jour par Mamerot,
chantre et chanoine de Troyes. D'ailleurs celui-ci, intitule passages faiz
oultre-mer par les roys de France et autres princes et seigneurs Francois
contre les Turcqs et autres Sarrasins et Mores oultre-marins, n'est point,
a proprement parler, un voyage, mais une compilation historique des
differentes craisades qui ont eu lieu en France, et que l'auteur, d'apres
la fausse Chronique de Turpin et nos romans de chevalerie, fait commencer a
Charlemagne. La Bibliotheque nationale possede de celui-ci un magnifique
exemplaire, orne d'un grand nombre de belles miniatures et tableaux.
Je viens a l'ouvrage de la Brocquiere; mais celui-ci demande quelque
explication.
Seconde Partie.
La folie des Croisades, comme tous les genres d'ivresse, n'avoit eu en
France qu'une certaine duree, ou, pour parler plus exactement, de meme que
certaines fievres, elle s'etoit calmee apres quelques acces. Et assurement
la croisade de Louis-le-Jeune, les deux de saint Louis plus desastreuses
encore, avoient attire sur le royaume assez de honte et de malheurs pour y
croire ce fanatisme eteient a jamais.
Cependent la superstition cherchoit de temps a le rallumer. Souvent, en
confession et dans certains cas de penitence publique, le clerge imposoit
pour satisfaction un pelerinage a Jerusalem, ou un temps fi
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