du marquis,
apres quoi on s'occuperait des demarches legales. Genevieve, a ce
mot, secoua la tete sans rien dire; son parti etait pris de ne jamais
recourir a ces moyens-la. Elle mettait son dernier espoir dans la
perseverance d'Andre a persuader son pere; elle ignorait que cette
perseverance avait dure une demi-heure et ne devait pas se ranimer.
Ils se separerent donc avec mille promesses mutuelles de se rejoindre
a la fin de la semaine et de s'ecrire tous les jours. Andre, selon les
conseils de Joseph, ecrivit a son pere et ne recut pas de reponse.
Genevieve resolut d'attendre le resultat de ces tentatives pour prendre
un parti. Nouvelles lettres d'Andre, nouveau silence du marquis.
Genevieve prolongea son absence. Andre, au desespoir, fit faire une
premiere sommation a son pere et partit pour Gueret. Il se jeta aux
pieds de Genevieve et la supplia de revenir avec lui, ou de lui
permettre de rester pres d'elle. Elle etait pres de consentir a l'un ou
a l'autre, lorsqu'il eut la mauvaise inspiration de lui apprendre le
dernier acte de fermete qu'il venait de faire aupres du marquis. Cette
nouvelle causa un profond chagrin a Genevieve; elle la desapprouva
formellement et se plaignit de n'avoir pas ete consultee. Au milieu de
sa tristesse, elle eprouva un peu de ressentiment contre son amant et ne
put se defendre de l'exprimer.
"Voila ou tu m'as entrainee, lui dit-elle. J'ai toujours voulu
t'eloigner ou te fuir, et par ton imprudence tu m'as jetee dans un abime
dont nous ne sortirons jamais. Me voila couverte de honte, perdue, et
pour laver cette tache, il faut que je t'exhorte a violer tous les
devoirs de la piete filiale. Non, c'est impossible, Andre; il vaut mieux
souffrir et n'etre pas coupable. Reussir au prix du remords, c'est se
condamner des cette vie aux tourments de l'enfer."
Andre ne savait que repondre a ces scrupules, que d'ailleurs il
partageait. Il sentait que son devoir etait de la quitter et de lui
laisser accomplir son courageux sacrifice, dut-il en mourir de chagrin.
Mais cela etait plus que tout le reste au-dessus de ses forces; il se
jetait a genoux, pleurait et demandait la pitie et les consolations de
Genevieve.
Genevieve etait forte et magnanime; mais elle etait femme et elle
aimait. Apres l'elan qui la portait aux grandes resolutions, la
tendresse et l'instinct du bonheur parlaient a leur tour. Elle
regrettait de n'avoir pas pour appui un amant plus courageux qu'elle.
--Ah! disait-elle
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