lpte pour les batailles de
l'amour.
--Voila mon homme, pensa celui qui avait parie contre la vertu de Lili
Lalouette.
Il se leva et entraina le nouveau venu dans un autre salon.
--Veux-tu gagner deux cent mille francs?
--Toujours.
--Eh bien! mets-toi en campagne et enleve Lili Lalouette.
--C'est impossible.
--Pourquoi?
--Parce qu'elle aime mieux l'argent que l'amour.
Et le jeune homme se dit, en soupirant:
--Apres avoir mieux aime l'amour que l'argent.
L'autre avait entendu.
--Allons donc, ne vas-tu pas faire des manieres. Songe, mon cher ami,
que je viens de parier deux cent mille francs que Lili se laisserait
prendre d'assaut. Tu la prendras par toutes les roueries du coeur, car
le coeur est encore plus malin que l'esprit. Or, tu aimes Lili. En
campagne, morbleu; cent mille francs, c'est quelque chose pour un homme
qui n'a pas le sou.
--Comment, cent mille francs! tu disais deux cents?
--Nous partagerons. Je ne parle pas de Lili.
--Pourquoi partagerions-nous?
--N'est-ce pas moi qui ai parie? N'est-ce pas moi qui perdrais si tu ne
triomphais pas?
II
Pourquoi M. Alphonse***, connu dans le monde litteraire par un
pseudonyme sonore, etait-il, en avril 1883, rue de Tilsitt, en face d'un
des hotels massifs que les embellissements de Paris doivent au lourd
crayon de l'architecte Hittorff? Il ne faisait pas un temps a se
promener la sans parapluie, deja deux giboulees avaient eclate sur
l'Arc-de-Triomphe. Alphonse*** s'abritait comme il pouvait sous les
appuis des fenetres, tout en se tordant les moustaches avec impatience.
Il ne fallait pas beaucoup de penetration pour deviner un amoureux qui
attendait un signal; mais les croisees etaient impassibles, pas une ne
s'ouvrait pour lui dire bonjour. Il y a des maisons qui sourient comme
il y a des maisons qui pleurent. Celle qu'Alphonse*** devorait des yeux
semblait dormir.
A la troisieme giboulee, il frappa du pied et decida qu'il n'attendrait
pas plus longtemps. Mais sans doute il vit remuer un rideau, car il leva
son mouchoir en signe de joie.
Il rentra chez lui et se mit a ecrire cette lettre d'une main fievreuse:
_Lili, Lili, je meurs de ne pas vous voir; car je n'appelle pas cela
vous voir quand vous passez au Bois ou sur le boulevard avec cet homme
qui est un geolier. Lili, souvenez-vous! Avez-vous oublie ces jours
rapides ou vous etiez heureuse quand je vivais a vos pieds?--Ne t'ai-je
pas aimee avec idolatrie? N'est-c
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