ieil or qui donnaient encore plus
de relief aux etincelles de la chevelure. On sait d'ailleurs que les
couleurs amies font une harmonie plus poetique.
La marquise, toute masquee qu'elle fut, voulut indiquer la noblesse
de sa figure par une couronne de marquise surmontant des armoiries
imaginaires.
Tout cela etait beau comme l'inspiration, aussi le peintre ne perdit pas
de temps; apres deux heures de seance, il avait largement ebauche toute
la figure sur un fond safrane. On pouvait deja juger qu'il creerait une
oeuvre vivante. Mme de Marcy posait dans le nonchaloir des sultanes,
sans s'inquieter des regards plus ou moins ardents du jeune peintre.
Georges Marmont, cachant son emotion, apparaissait de loin en loin pour
donner un conseil avec l'air d'un homme qui ne se preoccupe que de
l'amour de l'art.
Il se passa un episode qui appartient, non pas a l'histoire, mais a
l'histoire de la pudeur. Voici:
Quoiqu'il y eut un beau feu dans la cheminee et deux brazeros de chaque
cote du lit--un lit de milieu--Mme de Marcy eut quelques tressaillements
de froid. "Manque d'habitude, lui dit le peintre. Il faut aller vous
chauffer a la cheminee."
Elle resista d'abord. Enfin elle se decida a descendre du lit.
--Eh bien, Raphael, laissez-moi seule.
Le peintre obeit. Elle denoua son masque et marcha vers la cheminee.
Or, si le nu a toute sa pudeur dans l'immobilite, il la perd dans le
mouvement.
La marquise le sentit bien, car en marchant vers la cheminee ses joues
s'empourprerent, ce que vit tres bien M. Marmont qui survenait pour la
troisieme fois.
En effet, quand il ouvrit la porte, il apercut Mme de Marcy dans la
psyche, plus belle encore sous cette rougeur de jeune fille.
--Allez-vous-en! lui cria-t-elle. Vous voyez bien que je rougis, meme
toute seule.
Il ne fallut que cinq seances pour achever ce demi-chef-d'oeuvre, car le
peintre n'etait pas un grand peintre, mais il avait saisi la verite, et
il peignait les chairs avec une touche voluptueuse. Il etait impossible,
grace au masque et a la teinte allumee des cheveux, de reconnaitre la
jeune dame, a moins qu'on ne la connut bien. Aussi l'artiste, content de
lui, demanda-t-il la permission d'exposer cette figure.
Mme de Marcy fit quelques facons, mais croyant a la discretion absolue
du peintre, elle consentit.
--Surtout, lui dit-elle, pas de mention honorable, ce qui me
deshonorerait.
On encadra la toile dans un cadre execute par une main savante--l
|