urmand
comme pas un. D'apres le menu projete pour le soir, il jugea qu'on le
traitait trop sans facon; aussi prepara-t-il un plat de son metier, en
envoyant une depeche a Paris.
La reponse a la depeche ne se fit pas longtemps attendre.
Le lendemain, a l'heure du dejeuner, on fit arriver au chateau un
convive inattendu: c'etait Mlle Nina.
--Oui, mon ami, dit-elle en sautant au cou d'Arnold: ta petite Nina en
rupture de coulisses; vois-tu, la vraie comedie est celle ou le coeur
joue un role.
--Chut! dit Arnold. J'ai peur que ma mere ne revienne de Biarritz.
--Oui, cher, mais en attendant, nous allons faire sauter le chateau.
N'est-ce pas, Versillac?
Le Bordelais approuva, tout heureux de retrouver l'atmosphere de Paris
dans les senteurs penetrantes de Mlle Nina.
On dejeuna gaiement et tristement; a peine eut-on servi le cafe que le
maitre de la maison se leva et sortit comme si on l'eut appele. C'est
qu'il se sentait appele par Mlle de Saint-Amant; c'est qu'il y a des
voix pour le coeur comme pour l'oreille. En moins de vingt minutes,
Arnold se retrouva a la grille du chateau de Belmarre.
Il arrivait a point, car Mlle de Saint-Amand descendait du perron;
cette fois elle ne revait plus et elle marchait a grande vitesse, mais
toujours avec une grace ailee, avec une desinvolture ideale.
Comme la veille, elle suivit la grande allee, mais elle disparut bientot
sous les massifs.
Ou allait-elle? car on ne se promene pas quand on marche si vite. Arnold
contourna la grande haie du parc pendant quelques secondes, esperant
suivre la jeune fille des yeux; mais tout d'un coup, une vieille
muraille se dressa devant lui. Ce n'etait pas la grande muraille de la
Chine; aussi Arnold qui avait fait ses preuves au cirque Molier sauta
sur la croupe comme sur celle d'un cheval. Il avait trouve sa stalle
pour le plus beau spectacle du monde. Une fois monte sur le vieux
mur, il fut ebloui par la reverberation du soleil sur un etang qu'il
entrevoyait a travers les branches flottantes des tilleuls, des frenes
et des saules. On eut dit des jeux de lumiere de Rousseau et de Diaz,
tant la feuillee riait et flamboyait.
Ce n'etait que le decor. Tout en regardant les menus details, Arnold vit
se dessiner un cygne sur l'etang. Il pensa alors que Mlle de Saint-Amant
etait peut-etre venue la pour le gouter du cygne, mais il ne la voyait
pas.
La solitude etait charmante, le merle malin sifflait le coucou, le
rossignol jaloux etou
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