regardons comme des scelerats qui
bouleversez la republique, qui la deshonorez en pretendant la defendre, et
nous avons voulu vous combattre et vous detruire. Oui, nous sommes tous
egalement coupables, nous sommes tous complices de Buzot, de Barbaroux, de
Petion, de Guadet; ce sont de grands et vertueux citoyens, dont nous
proclamons les vertus a votre face. Tandis qu'ils sont alles venger la
republique, nous sommes restes ici pour la glorifier en presence des
bourreaux. Vous etes vainqueurs, donnez-nous la mort."
Mais l'esprit de l'homme n'est pas fait de telle sorte, qu'il cherche ainsi
a tout simplifier par de la franchise. Le parti vainqueur veut convaincre,
et il ment; un reste d'espoir engage le parti vaincu a se defendre, et il
ment; et l'on voit, dans les discordes civiles, ces honteux proces, ou le
plus fort ecoute pour ne pas croire, ou le plus faible parle pour ne pas
persuader, et demande la vie sans l'obtenir. C'est apres l'arret prononce,
c'est apres que tout espoir est perdu, que la dignite humaine se retrouve,
et c'est a la vue du fer qu'on la voit reparaitre tout entiere.
Les girondins resolurent donc de se defendre, et il leur fallut pour cela
employer les concessions, les reticences. On voulut leur prouver leurs
crimes, et on envoya, pour les convaincre, au tribunal revolutionnaire tous
leurs ennemis, Pache, Hebert, Chaumette, Chabot, et autres, ou aussi faux,
ou aussi vils. L'affluence etait considerable, car c'etait un spectacle
encore nouveau que celui de tant de republicains condamnes pour la cause de
la republique. Les accuses etaient au nombre de vingt-un, tous a la fleur
de l'age, dans la force du talent, quelques-uns meme dans tout l'eclat de
la jeunesse et de la beaute. La seule declaration de leurs noms et de leur
age avait de quoi toucher.
Brissot, Gardien et Lasource, avaient trente-neuf ans; Vergniaud, Gensonne
et Lehardy, trente-cinq; Mainvielle et Ducos, vingt-huit; Boyer-Fonfrede et
Duchastel, vingt-sept; Duperret, quarante-six; Carra, cinquante; Valaze et
Lacase, quarante-deux; Duprat, trente-trois; Sillery, cinquante-sept;
Fauchet, quarante-neuf; Lesterp-Beauvais, quarante-trois; Boileau,
quarante-un; Antiboul, quarante; Vigee, trente-six.
Gensonne etait calme et froid; Valaze indigne et meprisant; Vergniaud etait
plus emu que de coutume; le jeune Ducos etait gai; et Fonfrede, qu'on avait
epargne dans la journee du 2 juin, parce qu'il n'avait pas vote pour les
arrestations de l
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