e, toute emue et toute en larmes, fit transporter l'enfant, que
le medecin avait debarrasse de ses hardes mouillees pour l'envelopper de
linges chauds, pendant qu'on allumait dans la large cheminee un beau feu
petillant, avec des fagots et des bourrees. Il s'agissait de ramener
la chaleur dans ce corps glace, qui ne donnait plus signe de vie, mais
Jules de Guersens percevait encore un leger battement du coeur. Tout
espoir n'etait donc pas perdu: il se mit a frotter doucement, avec de
la laine, toutes les parties du corps, que le froid de la mort semblait
avoir deja envahies; puis, il insuffla de l'air dans la poitrine, qu'il
presentait alternativement a l'action de la flamme du foyer. Enfin,
l'enfant poussa un faible soupir et entr'ouvrit les yeux qu'il referma
aussitot. Il etait sauve; on le mit dans le lit sous d'epaisses
couvertures, et on le laissa reprendre ses sens, en evitant de
l'emouvoir et de le troubler, pendant qu'il achevait de revenir a lui.
Jules de Guersens s'apercut seulement alors de l'etat ou il se trouvait
lui-meme, mouille des pieds a la tete et ayant besoin de changer
de vetements. Il demanda donc a Catherine Neveu la permission de
s'absenter, en lui promettant de ne pas rester longtemps eloigne de son
petit malade et la rassurant absolument sur les suites d'un accident qui
avait failli causer la mort de cet enfant. Catherine, assise au chevet
du lit dans lequel on avait couche l'enfant, qui commencait a se
ranimer, ne l'avait pas encore quitte des yeux: elle pleurait
silencieusement, en regardant cette gracieuse et sympathique figure,
empreinte d'une paleur mortelle, ou n'apparaissaient pas encore les
signes evidents du retour a la vie.
--Cet enfant est hors de danger, dit le medecin en partant; mais il
reclame toujours des soins, et je conseillerais d'avertir les parents.
--Ce malheureux enfant n'a peut-etre pas de mere, objecta Catherine;
s'il en avait une, elle ne l'eut pas laisse s'exposer ainsi a se noyer
dans le Clain. Pauvre cher enfant! ajouta-t-elle avec un accent de
tendre pitie, tu n'as donc plus de mere?
L'enfant avait entendu cette voix penetrante, qui lui allait jusqu'au
fond du coeur. Il fit un mouvement et rouvrit les yeux, puis il les
ferma et les rouvrit encore, en jetant autour de lui des regards
etonnes. Il ne savait pas ou il etait, et tous les objets qui
l'entouraient n'eveillerent aucun souvenir dans son esprit, qui avait
ressaisi quelques lambeaux de sa memoire; mais
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