s, la troupe
tragi-comique y siegeait tout entiere sous la garde du singe.
Charles d'Assoucy eut le coeur gros et les larmes aux yeux, en
s'accusant d'avoir tue son bon ami le singe, qu'il avait tant de fois
festoye d'oublies et de gimblettes, a la barbe du Savoyard. Apres un
court instant accorde a cette oraison funebre, apres une enquete des
localites, apres enfin une visite de curiosite a chacun des hauts
et puissants seigneurs de bois, qui etaient pour lui de vieilles
connaissances, d'Assoucy demeura convaincu de l'inutilite de ses
tentatives pour sortir immediatement de ce souterrain; il resolut donc
d'accepter sa destinee avec une stoique resignation, mais, pour passer
le temps et se desennuyer, il se hissa jusqu'a l'ouverture d'une
petite lucarne, par laquelle il aurait pu s'amuser, en toute autre
circonstance, a cracher dans l'eau pour faire des ronds et a saupoudrer
de poussiere les bateliers qui passaient sous la seconde arche du
Pont-Neuf.
L'ebranlement des pas et le son confus des voix cesserent de retentir
sous la voute du pont; la nuit etait venue, et on entendait encore, le
long des rives de la Seine, les cris de: _Vive le roi!_ se melant a
des cris de joie et de vengeance, comme les derniers echos de l'odieux
assassinat commis dans le Louvre par ordre du jeune Louis XIII:
d'Assoucy avait vu jeter dans la riviere les cendres du marechal
d'Ancre. Quand le silence se fut repose sur la ville plongee dans
l'obscurite, il n'espera plus qu'on vint lui rendre la liberte avant le
lendemain, si toutefois l'on devait venir. Il entendit avec chagrin le
carillon de la Samaritaine, qui sonnait l'heure du couvre-feu: tout
Paris avait soupe, excepte lui. Affame et altere, grelottant de froid,
il choisit, afin de s'y blottir, le coin le plus recule de la cave, et
s'enveloppa d'une vieille tapisserie, pour dormir, au lieu de souper.
Il dormait donc de bon appetit, depuis deux heures, et se rassasiait, en
reve, des plus excellents mets: il fut reveille par le bruit lointain
d'une porte qu'on ouvrait et qu'on refermait avec precaution; puis,
il entendit les pas de deux personnes qui descendaient ensemble dans
l'escalier. Ce n'etait point un songe, et il fut sur le point de
s'elancer vers ses liberateurs; mais, a la clarte d'une lanterne de
corne, que portait l'un des deux arrivants, il reconnut avec douleur le
Savoyard conduit par son page de musique. Il se demandait tout bas quel
malin genie se plaisait a lui forger
|