naturaliser francais pour obeir a des exigences
de famille, au moment de son mariage avec une francaise, celle qui
devait etre la mere de l'illustre Stangerson. Ainsi s'explique la
nationalite francaise du professeur Stangerson.
Vingt ans, adorablement blonde, des yeux bleus, un teint de lait,
rayonnante, d'une sante divine, Mathilde Stangerson etait l'une
des plus belles filles a marier de l'ancien et du nouveau
continent. Il etait du devoir de son pere, malgre la douleur
prevue d'une inevitable separation, de songer a ce mariage, et il
ne dut pas etre fache de voir arriver la dot. Quoi qu'il en soit,
il ne s'en enterra pas moins, avec son enfant, au Glandier, dans
le moment ou ses amis s'attendaient a ce qu'il produisit Mlle
Mathilde dans le monde. Certains vinrent le voir et manifesterent
leur etonnement. Aux questions qui lui furent posees, le
professeur repondit: "C'est la volonte de ma fille. Je ne sais
rien lui refuser. C'est elle qui a choisi le Glandier." Interroge
a son tour, la jeune fille repliqua avec serenite: "Ou aurions-
nous mieux travaille que dans cette solitude?" Car Mlle Mathilde
Stangerson collaborait deja a l'oeuvre de son pere, mais on ne
pouvait imaginer alors que sa passion pour la science irait
jusqu'a lui faire repousser tous les partis qui se presenteraient
a elle, pendant plus de quinze ans. Si retires vivaient-ils, le
pere et la fille durent se montrer dans quelques receptions
officielles, et, a certaines epoques de l'annee, dans deux ou
trois salons amis ou la gloire du professeur et la beaute de
Mathilde firent sensation. L'extreme froideur de la jeune fille ne
decouragea pas tout d'abord les soupirants; mais, au bout de
quelques annees, ils se lasserent. Un seul persista avec une douce
tenacite et merita ce nom "d'eternel fiance", qu'il accepta avec
melancolie; c'etait M. Robert Darzac. Maintenant Mlle Stangerson
n'etait plus jeune, et il semblait bien que, n'ayant point trouve
de raisons pour se marier, jusqu'a l'age de trente-cinq ans, elle
n'en decouvrirait jamais. Un tel argument apparaissait sans
valeur, evidemment, a M. Robert Darzac, puisque celui-ci ne
cessait point sa cour, si tant est qu'on peut encore appeler
"cour"les soins delicats et tendres dont on ne cesse d'entourer
une femme de trente-cinq ans, restee fille et qui a declare
qu'elle ne se marierait point.
Soudain, quelques semaines avant les evenements qui nous occupent,
un bruit auquel on n'attacha pas d'abord d'
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