otre autorite et mon droit, ou bien ne commencez pas.
La _Revue des Deux Mondes_ est toute prete a me prendre l'ouvrage
aux memes conditions, et cela ne me portera aucun prejudice. Ayez la
conscience en paix sur ce point.
A vous de coeur.
G. SAND.
CDLII
A M. DESPLANCHES
Nohant, 26 decembre 1859.
Oui, monsieur, j'aurai du courage. Je sais qu'il le faut; je ne m'etais
pas jetee dans la lutte par amour de la lutte, je ne la prevoyais meme
pas. J'etais jeune et je me sentais artiste. J'ai vieilli en luttant,
toujours etonnee de la haine des autres, mais sentant chaque jour
davantage que, quand on croit, on ne peut plus reculer. Je le voudrais
en vain: la verite est bien plus forte que moi, et meme je suis
naturellement faible; mais je l'aime tant, la verite, qu'elle me
pousse et me porte, et que tout ce qui n'est pas elle m'est a peu pres
indifferent.
Merci pour votre lettre. Elle est d'un grand coeur et d'un noble esprit.
Croyez-vous que de tels encouragements ne pesent pas cent fois plus dans
ma vie que les injures des cagots? Merci encore, et a vous de coeur.
G. SAND.
CDLIII
A M. CHARLES DUVERNET, A NEVERS
Nohant, 7 janvier 1860.
Mon vieux ami,
Je te remercie d'avoir pense a moi au nouvel an, et je t'envoie tous
mes voeux et toutes nos tendresses. Nohant felicite Nevers des graces,
talents et vertus de monsieur ton petit-fils. C'est une grande
consolation que ce petit etre apporte, en venant au monde, a travers
tant de peines qui vous ont frappe et que sa presence a le don d'alleger
sans qu'il s'en doute, lui qui n'a eu que celle de naitre pour faire des
heureux. Dis a ma petite Berthe combien je me rejouis pour elle, et que
je lui promets d'admirer avec enthousiasme jusqu'au moindre pet de son
cher tresor! Je vois aussi Eugenie en extase et Cyprien en idiotisme
comme tu me les depeins. J'attends la belle saison avec impatience pour
me joindre a ce concert d'adorations.
Quels temps nous avons eus! froid de Siberie, neige, chaleur de mai,
deluge, tempetes a decorner les boeufs, eclairs et tonnerre, tout
cela dans un mois, c'est a croire le bon Dieu fou. Et, dans le monde
politique, il se fait aussi trente-six sortes de temps. Voila notre
drole de corps d'empereur qui abandonne son petit pape mignon, qui serre
l'Angleterre contre son coeur, et qui, apres avoir convoque l'Europe a
dejeuner, lui fait entendre que l
|