cle naturel, comme ceux qui se sont deja
tant de fois accomplis sur la terre, pour que l'homme voie changer ses
besoins et ses organes en vue d'un milieu nouveau. J'ai vu des races
entieres s'abstenir de manger la chair des animaux, un grand progres
de la race entiere sera de devenir frugivore, et les carnassiers
disparaitront. Alors fleurira la grande association universelle,
l'enfant jouera avec le tigre comme le jeune Bacchus, l'elephant sera
l'ami de l'homme, les oiseaux de haut vol conduiront dans les airs nos
chars ovoides, la baleine transportera nos messages. Que sais-je! tout
devient possible sur notre planete des que nous supprimons le carnage
et la guerre. Toutes les forces intelligentes de la nature, au lieu
de s'entre-devorer, s'organisent fraternellement pour soumettre et
feconder la matiere inorganique... Mais j'ai tort de vous esquisser
ces merveilles; vous etes plus a meme que moi, jeunes esprits qui
m'interrogez, d'en evoquer les riantes et sublimes images. Il suffit
que, du monde reel, je vous aie lances dans le monde du reve. Revez,
imaginez, faites du merveilleux, vous ne risquez pas d'aller trop
loin, car l'avenir du monde ideal auquel nous devons croire depassera
encore de beaucoup les aspirations de nos ames timides et incompletes.
L'ORGUE DU TITAN
Un soir, l'improvisation musicale du vieux et illustre maitre Angelin
nous passionnait comme de coutume, lorsqu'une corde de piano vint a se
briser avec une vibration insignifiante pour nous, mais qui produisit
sur les nerfs surexcites de l'artiste l'effet d'un coup de foudre.
Il recula brusquement sa chaise, frotta ses mains, comme si, chose
impossible, la corde les eut cinglees, et laissa echapper ces etranges
paroles:
--Diable de titan, va!
Sa modestie bien connue ne nous permettait pas de penser qu'il se
comparat a un titan. Son emotion nous parut extraordinaire. Il nous
dit que ce serait trop long a expliquer.
--Ceci m'arrive quelquefois, nous dit-il, quand je joue le motif sur
lequel je viens d'improviser. Un bruit imprevu me trouble et il me
semble que mes mains s'allongent. C'est une sensation douloureuse
et qui me reporte a un moment tragique et pourtant heureux dans mon
existence.
Presse de s'expliquer, il ceda et nous raconta ce qui suit:
* * * * *
Vous savez que je suis de l'Auvergne, ne dans une tres-pauvre
condition et que je n'ai pas connu mes parents. Je fus eleve par la
charite
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