speces
charmantes a peu pres perdues aujourd'hui, une panachee rouge et blanc
qui n'etait pas tres-fournie en petales, mais qui montrait sa couronne
d'etamines d'un beau jaune vif et qui avait le parfum de la bergamote.
Elle etait rustique au possible, ne craignant ni les etes secs ni les
hivers rudes; la rose pompon, grand et petit modele, qui est devenue
excessivement rare; la petite rose de mai, la plus precoce et
peut-etre la plus parfumee de toutes, qu'on demanderait en vain
aujourd'hui dans le commerce, la rose de Damas ou de Provins que nous
savions utiliser et qu'on est oblige, a present, de demander au midi
de la France; enfin, la rose a cent feuilles ou, pour mieux dire,
a cent petales, dont la patrie est inconnue et que l'on attribue
generalement a la culture.
C'est cette rose _centifolia_ qui etait alors, pour moi comme pour
tout le monde, l'ideal de la rose, et je n'etais pas persuadee, comme
l'etait mon precepteur, qu'elle fut un monstre du a la science des
jardiniers. Je lisais dans mes poetes que la rose etait de toute
antiquite le type de la beaute et du parfum. A coup sur, ils ne
connaissaient pas nos roses the qui ne sentent plus la rose, et toutes
ces varietes charmantes qui, de nos jours, ont diversifie a l'infini,
mais en l'alterant essentiellement, le vrai type de la rose. On
m'enseignait alors la botanique. Je n'y mordais qu'a ma facon. J'avais
l'odorat fin et je voulais que le parfum fut un des caracteres
essentiels de la plante; mon professeur, qui prenait du tabac, ne
m'accordait pas ce criterium de classification. Il ne sentait plus que
le tabac, et, quand il flairait une autre plante, il lui communiquait
des proprietes sternutatoires tout a fait avilissantes. J'ecoutai donc
de toutes mes oreilles ce que disaient les eglantiers au-dessus de
ma tete, car, des les premiers mots que je pus saisir, je vis qu'ils
parlaient des origines de la rose.
--Reste ici, doux zephyr, disaient-ils, nous sommes fleuris. Les
belles roses du parterre dorment encore dans leurs boutons verts.
Vois, nous sommes fraiches et riantes, et, si tu nous berces un peu,
nous allons repandre des parfums aussi suaves que ceux de notre
illustre reine.
J'entendis alors le zephyr qui disait:
--Taisez-vous, vous n'etes que des enfants du Nord. Je veux bien
causer un instant avec vous, mais n'ayez pas l'orgueil de vous egaler
a la reine des fleurs.
--Cher zephyr, nous la respectons et nous l'adorons, repondirent les
f
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