posees en foyer.
On peut croire que les peuples primitifs aimaient a demeurer sur
l'eau, temoins les cites lacustres trouvees en si grand nombre et dont
vous avez entendu beaucoup parler.
Moi, j'imagine que, dans les pays de plaine comme les notres, ou l'eau
est rare, on creusait le plus profondement possible, et, autant que
possible, aussi dans le voisinage d'une source. On detournait au
besoin le cours d'un faible ruisseau et on l'emmagasinait dans ces
profonds reservoirs, puis l'on batissait sur pilotis une spacieuse
demeure, qui s'elevait comme un ilot dans un entonnoir et dont les
toits inapercus ne s'elevaient pas au-dessus du niveau du sol, toutes
conditions de securite contre le parcours des betes sauvages ou
l'invasion des hordes ennemies.
Quoi qu'il en soit, l'homme bleu residait dans une grande mardelle (on
dit aussi margelle), entouree de beaucoup d'autres plus petites et
moins profondes, ou plusieurs familles s'etaient etablies pour obeir a
ses ordres en beneficiant de sa protection. L'homme bleu fit le tour
de toutes ces citernes habitees, franchit, pour entrer chez ses
clients, les arbres jetes en guise de ponts, se chauffa a tous les
foyers, causa amicalement avec tout le monde, montrant sa merveilleuse
hache rose, et laissant volontiers croire qu'il l'avait recue en
present de quelque divinite. Si on le crut, ou si l'on feignit de le
croire, je l'ignore; mais la hache rose fut regardee comme un talisman
d'une invincible puissance, et, lorsque l'ennemi se presenta pour
envahir la tribu, tous se porterent au combat avec une confiance
exaltee. La confiance fait la bravoure et la bravoure fait la force.
L'ennemi fut ecrase, la hache rose du grand chef devint pourpre dans
le sang des vaincus. Une gloire nouvelle couronna les anciennes
gloires de l'homme bleu, et, dans sa terreur, l'ennemi lui donna le
nom de _Marteau-Rouge_, que sa tribu et ses descendants porterent
apres lui.
Ce marteau lui porta bonheur car il fut vainqueur dans toutes ses
guerres comme dans toutes ses chasses, et mourut, plein de jours,
sans avoir ete victime d'aucun des hasards de sa vie belliqueuse.
On l'enterra sous une enorme butte de terre et de sable suivant la
coutume du temps, et, malgre le desir effrene qu'avaient ses heritiers
de posseder le marteau rouge, on enterra le marteau rouge avec lui.
Ainsi le voulait la loi religieuse conservatrice du respect du aux
morts.
Voila donc notre caillou rejete dans le neant des t
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