orantes suscitees par la
perfidie de ceux que vous savez.
Tout ce qui a un peu de lumiere dans l'esprit et de droiture dans l'ame
se tourne vers vous comme vers le nom entierement pur, et le symbole
de l'esprit chevaleresque de la France republicaine. Vous ne vous
_preservez_ de rien, vous, quand tous les autres se mettent a l'abri.
Aussi vous traitent-ils de fou, ceux qui ne peuvent vous imiter. Mais,
selon moi, vous etes le seul sage et le seul logique, comme vous etes le
meilleur et le plus loyal. Quelqu'un vous comparait hier devant moi
a Jeanne d'Arc, et, moi, je disais qu'apres la purete de Robespierre
l'incorruptible (mais le terrible!), il fallait dans nos fastes
revolutionnaires quelque chose de plus pur encore, Barbes, tout aussi
ferme et aussi incorruptible, mais irreprochable dans ses sentiments de
franchise et d'humanite.
Je vous dis tout cela, et pourtant, je n'accepte pas le 15 mai. Ce que
j'en ai vu par mes yeux n'etait qu'une sorte d'orgie improvisee, et je
savais que vous ne vouliez point de cela. Le peuple a, en principe,
selon moi, le droit de briser sa propre representation, mais seulement
quand cette expression perfide de sa volonte brise le principe par
lequel elle est devenue souverainete nationale. Si cette Assemblee eut
repousse la Republique au 4 mai, meme si elle se fut constituee, _en
principe_, republique aristocratique, si elle eut voulu detruire le
suffrage universel et proclamer la monarchie, croyez-moi, le 15 mai
aurait ete un grand jour et nous ne serions pas ou nous en sommes. Mais,
quelque mal intentionnee que fut deja la majorite de cette Assemblee, il
n'y avait point encore de motifs suffisants pour que le peuple recourut
a ce moyen extreme.
Aussi le peuple se tint-il tranquille, tandis que les clubs seuls
agissaient, et nous savons bien que, dans ces mouvements de la portion
la plus bouillante des partis, il y a des ambitions d'une part et des
agents de provocation de l'autre. Vous rappelez-vous que les jours qui
precederent ce malheureux jour, je me permettais de vous calmer autant
qu'il etait en moi.
J'aurais voulu plus de douceur et de patience dans les formes de notre
opposition en general. Je trouvais nos amis trop prompts au soupcon, a
l'accusation, a l'injure. Je croyais ces representants moderes meilleurs
qu'ils ne paraissaient, je me persuadais que c'etaient pour la plupart
des hommes faibles et timides, mais honnetes dans le fond, et qui
accepteraient la verite
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