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d'autres etres que nous, comment ne les connaitrions-nous point depuis longtemps; comment ne les auriez-vous pas vus, vous? comment ne les aurais-je pas vus, moi?" Il repondit: "Est-ce que nous voyons la cent-millieme partie de ce qui existe? Tenez, voici le vent, qui est la plus grande force de la nature, qui renverse les hommes, abat les edifices, deracine les arbres, souleve la mer en montagnes d'eau, detruit les falaises, et jette aux brisants les grands navires, le vent qui tue, qui siffle, qui gemit, qui mugit,--l'avez-vous vu, et pouvez-vous le voir? Il existe, pourtant." Je me tus devant ce simple raisonnement. Cet homme etait un sage ou peut-etre un sot. Je ne l'aurais pu affirmer au juste; mais je me tus. Ce qu'il disait la, je l'avais pense souvent. _3 juillet_.--J'ai mal dormi; certes, il y a ici une influence fievreuse, car mon cocher souffre du meme mal que moi. En rentrant hier, j'avais remarque sa paleur singuliere. Je lui demandai: --Qu'est-ce que vous avez, Jean? --J'ai que je ne peux plus me reposer, Monsieur, ce sont mes nuits qui mangent mes jours. Depuis le depart de Monsieur, cela me tient comme un sort. Les autres domestiques vont bien cependant, mais j'ai grand peur d'etre repris, moi. _4 juillet_.--Decidement, je suis repris. Mes cauchemars anciens reviennent. Cette nuit, j'ai senti quelqu'un accroupi sur moi, et qui, sa bouche sur la mienne, buvait ma vie entre mes levres. Oui, il la puisait dans ma gorge, comme aurait fait une sangsue. Puis il s'est leve, repu, et moi je me suis reveille, tellement meurtri, brise, aneanti, que je ne pouvais plus remuer. Si cela continue encore quelques jours, je repartirai certainement. _5 juillet_.--Ai-je perdu la raison? Ce qui s'est passe, ce que j'ai vu la nuit derniere est tellement etrange, que ma tete s'egare quand j'y songe! Comme je le fais maintenant chaque soir, j'avais ferme ma porte a clef; puis, ayant soif, je bus un demi-verre d'eau, et je remarquai par hasard que ma carafe etait pleine jusqu'au bouchon de cristal. Je me couchai ensuite et je tombai dans un de mes sommeils epouvantables, dont je fus tire au bout de deux heures environ par une secousse plus affreuse encore. Figurez-vous un homme qui dort, qu'on assassine, et qui se reveille avec un couteau dans le poumon, et qui rale, couvert de sang, et qui ne peut plus respirer, et qui va mourir, et qui ne comprend pas--voila. Ayant enfin reconquis ma raison, j'eus s
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