Les prejuges des travailleurs aidant, ils y reussirent."
Et ailleurs: "En effet, l'idee des marxistes est d'empecher les
travailleurs de s'occuper de lutte economique. La lutte economique,
c'est bon pour des reveurs comme Marx et Bakounine. En gens pratiques,
ils s'occuperont de votes. Ils feront des alliances, les uns avec les
conservateurs, les autres avec Guillaume II, et ils pousseront les leurs
au parlement. C'est l'article premier, le point essentiel de la bible
marxiste."
Il parait meme qu'on s'abstient de parler du role de l'Etat; il en
resulte que generalement on evite l'ecueil par quelques phrases
generales, sans approfondir aucunement la question. Ce fut encore
Kropotkine qui traita le probleme au veritable point de vue dans son
_Etude sur la Revolution_:
"Les bourgeois savaient ce qu'ils voulaient; ils y avaient pense depuis
longtemps. Pendant de longues annees, ils avaient nourri un ideal de
gouvernement et quand le peuple se souleva, ils le firent travailler a
la realisation de leur ideal, en lui accordant quelques concessions
secondaires sur certains points, tels que l'abolition des droits feodaux
ou l'egalite devant la loi. Sans s'embrouiller dans les details, les
bourgeois avaient etabli, bien avant la revolution, les grandes lignes
de l'avenir. Pouvons-nous en dire autant des travailleurs?
Malheureusement non. Dans tout le socialisme moderne et surtout dans sa
fraction moderee, nous voyons une tendance prononcee a ne pas
approfondir les principes de la societe que l'on voudrait degager de la
revolution. Cela se comprend. Pour les moderes, parler revolution c'est
deja se compromettre et ils entrevoient que s'ils tracaient devant les
travailleurs un simple plan de reformes, ils perdraient leurs plus
ardents partisans. Aussi preferent-ils traiter avec mepris ceux qui
parlent de societe future ou cherchent a preciser l'oeuvre de la
revolution. On verra cela plus tard, on choisira les meilleurs hommes et
ceux-ci feront tout pour le mieux! Voila leur reponse. Et quant aux
anarchistes, la crainte de se voir divises sur des questions de societe
future et de paralyser l'elan revolutionnaire, opere dans un meme sens;
on prefere generalement, entre travailleurs, renvoyer a plus tard les
discussions que l'on nomme (a tort, bien entendu) theoriques, et l'on
oublie que peut-etre dans un an ou deux on sera appele a donner son avis
sur toutes les questions de l'organisation de la societe, depuis le
fonctionnement
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