rdonnees d'une veritable cataracte.
Les basses branches du tronc de sapin couche en travers trempaient dans
le courant, qui leur imprimait un mouvement de va-et-vient regulier,
quoique assez inquietant.
Pour le quart-d'heure, Arthur se moquait bien de ces oscillations!
Ayant leve les yeux vers la cime du cap, en face, il avait entrevu un
mouchoir blanc agite par une main de femme....
En avant donc!
Il s'elanca....
Mais il n'avait pas fait la moitie du trajet, que la passerelle se
rompit par le milieu et s'abima dans le torrent.
Deux cris dominerent un instant le tapage des eaux heurtees: l'un
pousse par une voix de femme,--cri de terreur! l'autre par un organe
masculin,--clameur d'agonie!
Puis... l'eternelle chanson des chutes!
Les voix humaines s'etaient tues.
Le gouffre entrainait sa victime.
Ou etait donc Wapwi, le devoue enfant des bois?
Allait-il laisser, perir son maitre, sans tenter un effort pour le
sauver!
Nous allons bien voir....
Wapwi avait recu l'ordre d'attendre, sur la rive droite, le retour de
son compagnon.
Il etait donc la, le suivant des yeux, au moment ou la passerelle
"'effondra, et, chose singuliere, a l'instant precis de la catastrophe,
il pensait justement a la possibilite d'un accident de cette nature.
Dire qu'il n'eut pas une seconde d'emotion terrible serait conraire a la
verite.
Affirmer absolument aussi qu'il fut pris par surprise, en voyant le
tronc d'arbre se rompre, ne rendrait pas, non plus, exactement son etat
d'ame....
Nous dirions presque qu'il s'y attendait,--ou du moins que son
instinct de sauvage l'avertissait que quelque evenement imprevu allait
arriver,--si nous pouvions analyser une sensation aussi vague, un
pressentiment aussi rapide, que celui qui l'etreignit soudain au moment
ou Arthur mettait le pied sur la maudite passerelle.
Domine par ce singulier pressentiment, il avait jete un rapide coup
d'oeil en aval, dans la direction de la plus prochaine chute, a deux
arpents au plus de distance.
Et c'est justement a ce qu'il pourrait faire, en cas d'accident, que
pensait le jeune Abenaki, lorsque l'evenement redoute eut lieu.
Sans meme pousser un cri, il prit sa course du cote de la chute, cassa
en un tour de main une longue gaule de frene, devala sur le flanc
escarpe de la rive et se trouva,--Dieu sait par quel miracle
d'adresse!--sur une etroite corniche a fleur d'eau, saillant de quelques
pouces en dehors de la muraille a peine
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