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Le conflit entre cette tendance verbale et la precedente determine son
pessimisme; le triomphe de cette tendance sur la precedente, un
symbolisme.
Son amour des mots indefinis,--c'est-a-dire tels qu'ils provoquent dans
l'esprit non une image, mais la sourde tendance a en former une et le
vif sentiment d'effort et d'elation qui accompagne toute tendance
intellectuelle confuse,--le porta aux sujets ou il pouvait le
satisfaire, aux epoques lointaines et vagues, aux mouvements intimes de
l'ame feminine, aux scenes lunaires et aux theogonies mortes. Enfin sa
facon de joindre ces sortes de mots determinerent les autres caracteres
de son art.
Sa tendance a ecrire en phrases statiques, c'est-a-dire qui soient
completes, explicites et independantes du contexte,--lui imposa la
necessite d'enclore un fait ou plusieurs en chaque periode. Par la le
nombre de ces faits dut etre enormement multiplie. S'abstenant de toute
repetition, de tout developpement, il lui fallut des actes, des choses,
des details; il dut etre en roman moderne un realiste, et en roman
historique, l'erudit qu'il fut. La difficulte de bien faire cette sorte
de phrase, la peine qu'elle lui donnait proscrivant toute prolixite, le
fit condenser ses descriptions et ses analyses, en leurs points les plus
significatifs, rendit son style tendu et stable. L'enorme tension
intellectuelle qu'exigeait cette sorte de phrase, le fit concentrer en
elle, en sa facture et en sa disposition rhythmique, la plupart de ses
forces, et le rendit moins attentif a la composition generale. Enfin,
les rares passages de passion et de poesie pure qui eclatent ca et la
dans son oeuvre et que la forme statique ne saurait expliquer, procedent
de son autre type de phrase, le periodique, que nous avons vu alterner
avec son style habituel.
Cette reduction de tout un developpement intellectuel, en l'ascendant de
quelques formes verbales, la contradiction entre les facultes d'un
esprit explique, par la contradiction entre les diverses parties d'un
systeme de style, c'est, dans l'investigation du mecanisme intellectuel
de Flaubert, passer de la psychologie a la theorie du langage. En
fonction de cette science, il existait dans l'intelligence de Flaubert
d'une part une serie de donnees des sens et une serie de mots qui
s'accordaient avec elles et les exprimaient naturellement; de l'autre,
une serie de formes verbales acquises, et developpees, auxquelles
correspondaient non des donnees sens
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