pas de tous les agrements attaches aux
grands biens et aux grands merites?
Un peu delaisse d'Aramis, lequel, nous le savons, s'occupait
beaucoup de M. Fouquet, un peu neglige, a cause du service, par
d'Artagnan, blase sur Truechen et sur Planchet, Porthos se surprit
a rever sans trop savoir pourquoi; mais a quiconque lui eut dit:
"Est-ce qu'il vous manque quelque chose, Porthos?" il eut
assurement repondu: "Oui."
Apres un de ces diners pendant lesquels Porthos essayait de se
rappeler tous les details du diner royal, demi-joyeux, grace au
bon vin, demi-triste, grace aux idees ambitieuses, Porthos se
laissait aller a un commencement de sieste, quand son valet de
chambre vint l'avertir que M. de Bragelonne voulait lui parler.
Porthos passa dans la salle voisine, ou il trouva son jeune ami
dans les dispositions que nous connaissons.
Raoul vint serrer la main de Porthos, qui, surpris de sa gravite,
lui offrit un siege.
-- Cher monsieur du Vallon, dit Raoul, j'ai un service a vous
demander.
-- Cela tombe a merveille, mon jeune ami, repliqua Porthos. On m'a
envoye huit mille livres, ce matin, de Pierrefonds, et, si c'est
d'argent que vous avez besoin...
-- Non, ce n'est pas d'argent; merci, mon excellent ami.
-- Tant pis! J'ai toujours entendu dire que c'est la le plus rare
des services, mais le plus aise a rendre. Ce mot m'a frappe;
j'aime a citer les mots qui me frappent.
-- Vous avez un coeur aussi bon que votre esprit est sain.
-- Vous etes trop bon. Vous dinerez bien, peut-etre?
-- Oh! non, je n'ai pas faim.
-- Hein! Quel affreux pays que l'Angleterre?
-- Pas trop; mais...
-- Voyez-vous, si l'on n'y trouvait pas l'excellent poisson et la
belle viande qu'il y a, ce ne serait pas supportable.
-- Oui... je venais...
-- Je vous ecoute. Permettez seulement que je me rafraichisse. On
mange sale a Paris. Pouah!
Et Porthos se fit apporter une bouteille de vin de Champagne.
Puis, ayant rempli avant le sien le verre de Raoul, il but un
large coup, et, satisfait, il reprit:
-- Il me fallait cela pour vous entendre sans distraction. Me
voici tout a vous. Que demandez-vous, cher Raoul? que desirez-
vous?
-- Dites-moi votre opinion sur les querelles, mon cher ami.
-- Mon opinion?... Voyons, developpez un peu votre idee, repondit
Porthos en se grattant le front.
-- Je veux dire: Etes-vous d'un bon naturel quand il y a demele
entre vos amis et des etrangers?
-- Oh! d'un naturel exce
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