ux!... Je n'en ai pas, moi, si ce n'est mon
oubliette de Bracieux!
-- Vous ajouterez, dit Raoul, que mon dernier motif de me croire
outrage, c'est le portrait que M. de Saint-Aignan sait bien.
-- Eh! mais, encore un portrait?... Quoi! un demenagement, une
trappe et un portrait? Mais, mon ami, dit Porthos, avec l'un de
ces griefs seulement, il y a de quoi faire s'entr'egorger toute la
gentilhommerie de France et d'Espagne, ce qui n'est pas peu dire.
-- Ainsi, cher, vous voila suffisamment muni?
-- J'emmene un deuxieme cheval. Choisissez votre lieu de rendez-
vous, et, pendant que vous attendrez, faites des plies et fendez-
vous a fond, cela donne une elasticite rare.
-- Merci! J'attendrai au bois de Vincennes, pres des Minimes.
-- Voila qui va bien... Ou trouve-t-on ce M. de Saint-Aignan?
-- Au Palais-Royal.
Porthos agita une grosse sonnette. Son valet parut.
-- Mon habit de ceremonie, dit-il; mon cheval et un cheval de
main.
Le valet s'inclina et sortit.
-- Votre pere sait-il cela? dit Porthos.
-- Non; je vais lui ecrire.
-- Et d'Artagnan?
-- M. d'Artagnan non plus. Il est prudent, il m'aurait detourne.
-- D'Artagnan est homme de bon conseil, cependant, dit Porthos
etonne, dans sa modestie loyale qu'on eut songe a lui quand il y
avait un d'Artagnan au monde.
-- Cher monsieur du Vallon, repliqua Raoul, ne me questionnez
plus, je vous en conjure. J'ai dit tout ce que j'avais a dire.
C'est l'action que j'attends; je l'attends rude et decisive, comme
vous savez les preparer. Voila pourquoi je vous ai choisi.
-- Vous serez content de moi, repliqua Porthos.
-- Et songez, cher ami, que, hors nous, tout le monde doit ignorer
cette rencontre.
-- On s'apercoit toujours de ces choses-la, dit Porthos quand on
trouve un corps mort dans le bois. Ah! cher ami, je vous promets
tout, hors de dissimuler le corps mort. Il est la, on le voit,
c'est inevitable. J'ai pour principe de ne pas enterrer. Cela sent
son assassin. Au risque de risque, comme dit le Normand.
-- Brave et cher ami, a l'ouvrage!
-- Reposez-vous sur moi, dit le geant en finissant la bouteille,
tandis que son laquais etalait sur un meuble le somptueux habit et
les dentelles.
Quant a Raoul, il sortit en se disant avec une joie.
"Oh! roi perfide! roi traitre! je ne puis t'atteindre! Je ne le
veux pas! Les rois sont des personnes sacrees; mais ton complice,
ton complaisant, qui te represente, ce lache va payer ton crime!
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