e pieds, une fenetre ayant toutes ses vitres. J'entrais dans ces
maisons sur leur mine. Bien baties et tenues fraiches, au dehors, par un
air pur, elles annoncaient l'aisance. On est tout surpris de trouver,
des l'entree, une sorte de vestibule voute qui sert de latrines aux
passants; un escalier noir, etroit, avec des marches de deux pieds de
haut, conduisant a un bouge infame dont l'odeur vous fait reculer. Il
est vrai que l'on a du marbre sous les pieds et des fresques telles
quelles sur la tete. Le superflu est le necessaire pour le Romain, et
reciproquement.
L'interieur de l'_Albergo Nobile_ de Frascati, ancien palais vendu et
revendu, est une curiosite sous ce rapport. On traverse de vastes salles
remplies de statues de marbre blanc, copiees sur des antiques. Dans un
grand hemicycle qui sert de salon principal, il y a tout un Olympe
d'une colossale betise. Ailleurs, ce sont des chambres representant des
paysages vus a travers des colonnes, des salles de bain fort agreables,
avec des baignoires de marbre blanc sur le modele des vasques antiques;
d'autres endroits plus secrets encore sont aussi en marbre blanc et
decores de sculptures. Puis sur tout ce luxe de parois, loques de tapis
rapieces, des fauteuils depareilles, si gras et si vermoulus, qu'on
n'ose s'y asseoir; des lits rembourres d'ardoises, et, pour ornements,
des vases en cartonnage fane, rouge et or, contenant des bouquets de
plumes de paon. Je m'imagine que le roi de Tombouctou, ou le grand
chef des Tetes-Plates, se pamerait d'aise devant un pareil gout de
decoration.
Ce que j'ai enfin trouve de plus confortable et de moins cher, c'est la
villa Piccolomini, ou me voila installe. C'est une grande maison carree,
largement bati, et qui, malgre son denument et son etat de degradation,
merite encore le titre de palais. Un perron, a marches brisees et
disjointes, ou il faut se baisser pour passer sous le linge qui seche
sur des cordes, donne entree a un vestibule ferme, qui, rempli de
fleurs, ferait une jolie serre. Au rez-de-chaussee s'etendent d'immenses
appartements voutes, d'une elevation disproportionnee, et perces de
petites fenetres qui ont ferme jadis. Tout cela est dispose pour le
frais en ete; mais, au temps ou nous sommes, c'est glacial. La fresque
qui garnit tout, de la base au faite de ces chambres-edifices, est d'un
gout insupportable. Tantot cela veut imiter les arabesques de Raphael
et n'imite absolument rien; tantot d'atroces bonshommes nu
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