-etre, il allait la perdre, et l'effroyable eclair de desespoir qui traversa son coeur a cette pensee lui montra combien elle lui etait necessaire.
Il se leva a son tour, il balbutia:
-- Mais je n'ai jamais dit, jamais pense rien de pareil. Je vous respecte et je crois en vous. Je vous supplie humblement de ne pas me repousser.
-- Encore un mot, interrompit Maud, sans attenuer la severite triste de son regard. Je vous disais tout a l'heure: ma vie de femme dependra de mon mari. Donc si mon mari m'impose de vivre loin du monde, j'obeirai, seulement je ne sais pas si, loin du monde, je serai heureuse: j'ai le gout d'un certain decor d'elegance, d'un certain milieu d'art et d'esprit... Il me semble que cela n'existe guere hors de Paris. Si l'on m'eloigne de Paris pour toujours, je serai peut-etre depaysee, comme nos oiseaux des colonies qui deperissent ici. Je ne serai peut-etre point heureuse, et, vous le savez, si l'un souffre, l'autre souffre aussi. Reflechissez bien a tout cela, mon ami, ajouta-t-elle, en adoucissant lentement sa voix.
Et elle laissa prendre ses mains par Maxime qui se pencha dessus, n'osant la regarder. D'une voix si passionnee qu'elle en sentit fremir les echos dans son coeur:
-- Je suis a vous, murmura-t-il, sans conditions et comme vous voudrez. Je suis votre esclave, votre chose. Si vous refusez d'etre ma femme, oh ! dites-le-moi maintenant: je n'ai plus de force pour l'incertitude. Si vous me repoussez, je crois que je mourrai, mais je mourrai sur le coup. Cette mort lente de l'incertitude est epouvantable.
Il avait glisse a ses pieds, un genou sur le tapis; elle lui laissait ses mains qu'il appuyait contre son visage, mais elle ne le relevait pas.
-- Je vous en prie ! Je vous en prie !
Elle repondit:
-- Je vous demande une foi absolue en moi, telle que vous l'avez en votre mere ou en votre soeur.
Il repeta, avec les memes mots:
-- J'ai foi en vous, comme en ma mere ou en ma soeur.
Alors Maud le releva lentement. Il n'osait la regarder, lire l'arret dans ses yeux.
Elle demanda:
-- Votre mere et votre soeur... leur avez-vous parle d'un mariage possible avec moi ? Qu'en pensent-elles ?
-- Ma mere et Jeanne sont des etres si simples que vous leur imposez un peu; peut-etre elles s'effrayent de voir epris de vous un campagnard tel que moi: je le suppose, car elles ne m'ont pas questionne et je ne leur ai pas dit mes projets. Mais toutes deux, je vous le jure, vous respectent comme elles le doi
|