un renouveau de pudeur juvenile vis-a-vis des choses qu'elle avait jusqu'ici considerees comme inevitables, avec quoi son deuil la faisait rompre.
-- Qu'est-ce qu'il faut dire, mademoiselle ? demanda la petite bonne.
-- Dites que j'y vais.
Elle rejoignit Maud et Le Tessier. Tous deux l'embrasserent tendrement sur ses larmes qui jaillissaient de nouveau.
-- Ma cherie !
-- Ma pauvre enfant !
Ils s'assirent, la tenant entre eux. Etiennette, par breves reponses, racontait la nuit.
-- Et que vas-tu faire maintenant ? demanda Maud.
Elle eut un geste d'incertitude et de decouragement.
-- Ecoutez, ma chere enfant, dit Paul Le Tessier. Maud et moi, nous sommes d'avis que vous ne pouvez pas demeurer ici, dans cette maison vide, tout de suite apres la mort de votre mere. Voici donc ce que je vous propose,d'accord avec elle et avec Mme de Rouvre... Oh ! soyez tranquille, reprit-il, repondant a un geste de refus qu'il devinait. Je ne vous offre aucune espece de secours, bien que, vous le savez, je sois a votre disposition, comme pourrait l'etre un frere aine... Mme de Rouvre va venir pendant un mois s'installer a Chamblais, avec Maud et Jacqueline...
-- Oui, interrompit Maud. Tu devines pourquoi, n'est-ce pas ? Il n'y a pas d'autre moyen, je crois, de calmer la jalousie de qui tu sais. Et puis, du reste, j'ai horreur de Paris... Veux-tu venir avec nous ? C'est maman et moi qui t'invitons; aucune raison de refuser.
Etiennette ne repondit pas tout de suite. Sa logique de fille raisonnable et experimentee lui disait: "Decidement, Paul songe a m'epouser... Et Maud a peur de Suberceaux si elle reste a Paris. Cette combinaison arrange tout le monde. N'importe, c'est bien de m'avoir fait une part dans leurs projets."
Elle embrassa Maud:
-- J'accepte, ma cherie, et je te remercie.
Et comme Paul a son tour l'embrassait, elle se sentit soudainement si reconfortee par cette etreinte qu'elle pensa, plus tendrement que jamais: "Il m'aime bien... C'est bon d'etre aimee ! Cher ami !"
IV
Julien de Suberceaux avait quitte le bal au moment ou, le cotillon fini, on commencait a installer les tables du souper. Telle etait la volonte de Maud qui lui avait jete a l'oreille cet ordre bref: "Rentrez chez vous le plus tot possible. Je ne tarderai pas..." Elle savait bien qu'avec une telle promesse, il obeirait.
Il regagna son logis a pied, le long des grandes avenues paisibles a cette heure matinale comme les allees d'un parc. Sur le fon
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