son impulsion: il se rappela que des trains partaient toutes les "heures cinq" et toutes les "heures trente-cinq", a la gare du Nord. "J'arriverai un peu tot... vers dix heures et demie." Qu'importe ? Il voulait etre la, s'interposer entre Maud et Maxime, le plus vite possible. "Oui... voir Chantel." Le voeu instinctif de son coeur se formulait. Voir Maxime. Pourquoi ? Pour le tuer ? Pour le supplier ? Pour le convaincre ? Cela, il ne le savait pas encore. "Il faut que je le voie." C'etait maintenant une formule aussi indiscutable pour lui que l'autre, tout a l'heure: "Il ne faut pas que Maud se marie."
Il arriva a la gare du Nord quelques minutes avant le depart du train de neuf heures et demie. Peu de monde encore; il fut seul dans son compartiment. Quand le train s'ebranla, Julien commenca a reflechir. Les yeux de sa raison s'habituaient insensiblement a cette clarte de l'idee fixe qui d'abord l'avait ebloui. Il entrait dans l'action; il commenca a _voir_, avec la nettete et la surete de l'instinct, ce qu'il allait faire.
Dans moins d'une demi-heure, il serait a la gare de Chamblais. Il se rappela le decor: la petite gare rouge et jaunatre, dressee, presque isolee, dans un paysage de plaine, ceint par des moutonnements de forets... Il se rappela la traverse dont lui avait parle Hector, le sentier sous bois qui menait a une porte lattee. Par la passait Maxime. Irait-il l'attendre dans ce chemin, comme un voleur ? Cette seconde nature que creent a un homme de longues habitudes de correction raffinee se revolta contre l'ignominie. "Non... ce n'est pas possible... Mais je peux l'attendre a la gare. Il faudra bien qu'il passe devant moi." Il songea tout a coup que peut-etre Maxime viendrait en voiture... La certitude de l'instinct protesta: "Non... il viendra par le train... je le verrai..." Et tout de suite il eut resolu ce qu'il ferait: attendre a la gare l'arrivee du train, se meler aux gens qui descendaient, aborder Maxime tout naturellement... Ne se connaissaient-ils pas assez ?... Que se passerait-il alors entre eux, immediatement apres l'abord ? Cela encore, Julien ne le savait pas. Il espera secretement, en ce moment ou il essayait de derober son secret a l'avenir, un mouvement d'impatience de la part de Chantel, un pretexte quelconque a duel. Ah ! se battre avec lui ! le tuer ! le tuer... Tout finir sans recommencement possible, d'un coup d'epee ! L'evocation de sa fievre avait change, il voyait maintenant en face de lui un plastron de chemi
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