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ujours. "Tu ne veux plus de moi; je gene ta vie; eh bien ! pardonne-moi: je laisse ta route libre. Je ne te demande pas de me regretter, de me pleurer: pense seulement a moi avec amitie, plus tard, pour prix de ma prompte obeissance au dernier ordre que j'ai recu de toi. Je ne te demande pas de m'aimer au dela de la mort: je sais que tu ne m'aimes plus. Je te supplie seulement de ne pas effacer de ta memoire que tu m'as aime. Je t'en supplie, rappelle-toi parfois, sans mauvaise rancune... Vois, je pars tout simplement, et j'ai tant souffert ! "Moi, le temps ou tu m'as aime fut a ce point toute ma vie et me comble le coeur si parfaitement que je ne m'irrite pas contre la Providence. Malgre mon agonie presente, je sais bien que j'aurai eu la vie plus belle, plus enviable. Maud cherie !... Rien n'effacera cela: tu m'as fait, a des minutes rares, l'abandon de toi-meme, et tu as connu l'amour par moi ! Rien n'effacera cela; je me le redis a toute heure, et chaque fois cela me parait si merveilleux et si adorable, que j'oublie de souffrir. "Mais quand je pense que demain tu seras a un autre, qu'un autre te regardera et te touchera, la douleur d'une balle dans la tempe me semble aussitot desirable. Voila pourquoi je veux mourir, et j'embrasse la mort ardemment, malgre l'horreur de l'inconnu qui est au dela. Car cet au-dela, j'y crois, Maud: la croyance m'en est revenue avec tant d'autres, dans le bouleversement de ces temps-ci. Et j'y puisse le courage de te dire: nous nous sommes trompes, nous avons fait le mal, nous avons agi contre notre conscience. Nous avons merite d'etre punis. Je demande que la punition me frappe seul ! "Adieu, mon cher sphinx, cruel et bienfaisant: je meurs tout a toi... A l'heure ou je me tuerai, tout a l'heure, je penserai a tes levres, a tes yeux, a l'odeur de tes cheveux et de tes bras, et je mourrai a toi, parmi toi, tout en toi. Je t'aime, je t'aime, je t'aime." "JULIEN." VI L'automne commencait, de cette meme annee 1893, quand Paul Le Tessier se rendit a Vezeris, mande par son frere pour y solliciter en son nom la main de Jeanne de Chantel. Hector etait lui-meme a Vezeris: c'etait, depuis les evenements du dernier printemps, le second sejour qu'il y faisait. Paul arriva le matin, par un jour clair de septembre. On achevait les vendanges; a chaque tournant de route on croisait des chariots charges de "comportes" pleines, traines par deux boeufs conjuges. Le domaine de Vezeris etend ses amples dependa
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