nue a moi et qui m'a presque fait violence pour
que j'accepte ce pret.
Sa femme le regarda avec une telle surprise qu'il voulut tout de suite
la rassurer.
--C'est le vicomte de Mussidan, de qui je t'ai parle, que je rencontre
chez mon collegue le comte de Cheylus toutes les fois que j'y vais; un
homme du monde, charmant, tres lance. Je dinais hier chez M. de Cheylus,
et le vicomte de Mussidan comme toujours s'y trouvait. On n'a guere
parle que de la debacle des Bouteillier, qui tenaient dans le monde
parisien une place egale a celle qu'ils occupaient dans le commerce.
Sans avouer l'embarras dans lequel elle me mettait, je n'ai pas cache
qu'elle etait un coup sensible pour nous et qui se produisait aussi
mal a propos que possible. Quand je suis sorti, M. de Mussidan m'a
accompagne; nous avons cause des Bouteillier, longuement cause: tres
galamment il s'est mis a ma disposition, en me demandant d'user de lui
comme d'un ami; qu'il serait heureux de m'obliger; enfin tout ce que
peut dire un homme aimable. Je l'ai remercie, mais, bien entendu, j'ai
refuse. Ce matin, il est venu chez moi et a recommence ses offres
de services d'une facon si pressante que j'ai fini par accepter ses
cinquante mille francs; il se serait fache si j'avais persiste dans mon
refus.
--Voila qui est bien etonnant, dit la Maman.
--Qui serait etonnant de la part de tout autre, mais qui l'est beaucoup
moins de la sienne: c'est, je vous le repete, le plus charmant homme que
j'aie rencontre, et si je ne suis pas son ami, je crois pouvoir dire
qu'il est le mien; jamais personne ne m'a temoigne autant de sympathie;
s'il connaissait Berthe, je croirais qu'il veut etre mon gendre.
--Peut-etre veut-il etre tout simplement celui de la maison Adeline, dit
la Maman.
--Je crois que la maison Adeline ne dit pas grand'chose a un jeune homme
lance comme lui et vivant dans un monde ou la gloire des maisons de
commerce n'est pas cotee. Quoi qu'il en soit, les choses sont ainsi:
c'est lui qui m'a prete ces cinquante mille francs, et il nous rend un
service dont nous devons lui etre reconnaissants.
--En es-tu donc la, mon pauvre enfant, de ne pas pouvoir trouver
cinquante mille francs? s'ecria la Maman.
--Non, Dieu merci; mais j'en suis la de savoir gre a celui qui m'epargne
le souci de les chercher. Au lendemain de la debacle des Bouteillier,
dans laquelle on sait que nous sommes pris, il est bon qu'on ne croie
pas, dans notre monde, que je puis avoir u
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