tomber son ouvrage_.
Comment! toute sorte de livres! Est-ce qu'elle aurait introduit de
mauvais livres dans ma maison.
BARBE.
Des livres grecs, des livres latins. Quand ces livres-la ne sont ni les
Heures du diocese, ni le saint Evangile, ni les Peres de l'Eglise, ce ne
peuvent etre que des livres paiens ou heretiques! Tenez, en voici un des
moins gros que j'ai mis dans ma poche pour vous le montrer.
FRERE COME, _ouvrant le livre_.
Thucydide! Oh! nous permettons cela dans les colleges... Avec des
coupures, on peut lire les auteurs profanes sans danger.
SETTIMIA.
C'est tres-bien; mais quand on ne lit que ceux-la, on est bien pres de
ne pas croire en Dieu. Et n'a-t-elle pas ose soutenir hier a souper que
Dante n'etait pas un auteur impie?
BARBE.
Elle a fait mieux, elle a ose dire qu'elle ne croyait pas a la damnation
des heretiques.
FRERE COME, _d'un ton cafard et dogmatique_.
Elle a dit cela? Ah! c'est fort grave! tres-grave!
BARBE.
D'ailleurs, est-ce le fait d'une personne modeste de faire sauter un
cheval par-dessus les barrieres?
SETTIMIA.
Dans ma jeunesse, on montait a cheval, mais avec pudeur, et sans passer
la jambe sur l'arcon. On suivait la chasse avec un oiseau sur le poing;
mais on allait d'un train prudent et mesure, et on avait un valet qui
courait a pied tenant le cheval par la bride. C'etait noble, c'etait
decent; on ne rentrait pas echevelee, et on ne dechirait point ses
dentelles a toutes les branches pour faire assaut de course avec les
hommes.
FRERE COME.
Ah! dans ce temps-la votre seigneurie avait une belle suite et de riches
equipages!
SETTIMIA.
Et je me faisais honneur de ma fortune sans permettre la moindre
prodigalite. Mais le ciel m'a donne un fils dissipateur, inconsidere,
meprisant les bons conseils, cedant a tous les mauvais exemples, jetant
l'or a pleines mains; et, pour comble de malheur, quand je le croyais
corrige, quand il semblait plus respectueux et plus tendre pour moi,
voici qu'il m'amene une bru que je ne connais pas, que personne ne
connait, qui sort on ne sait d'ou, qui n'a aucune fortune, et peut-etre
encore moins de famille.
FRERE COME.
Elle se dit orpheline et fille d'un honnete gentilhomme?
BARBE.
Qui le sait? On ne l'entend jamais parler de ses parents ni de la maison
de son pere.
FRERE COME.
D'apres ses habitudes, elle semblerait avoir ete elevee dans l'opulence.
C'est quelque fille de grande maison qui a epouse vo
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