voici Mosca qui lui leche les mains! _(Le precepteur tombe a
genoux. Marc, en pleurant et en criant, releve le cadavre de Gabriel.
Astolphe reste petrifie. )_
GIGLIO, _au precepteur_.
Donnez-moi l'absolution, monsieur le pretre! Messieurs, tuez-moi. C'est
moi qui ai tue ce jeune homme, un brave, un noble jeune homme qui
m'avait accorde la vie, une nuit que, pour le voler, j'avais deja tente,
avec plusieurs camarades, de l'assassiner. Tuez-moi! J'ai femme et
enfants, mais c'est egal, je veux mourir!
ASTOLPHE, _le prenant a la gorge_.
Miserable! tu l'as assassine!
LE PRECEPTEUR.
Ne le tuez pas. Il n'a pas agi de son fait. Je reconnais ici la main du
prince de Bramante. J'ai vu cet homme chez lui.
GIGLIO.
Oui, j'ai ete a son service.
ASTOLPHE.
Et c'est lui qui t'a charge d'accomplir ce crime?
GIGLIO.
J'ai femme et enfants, monsieur; j'ai porte l'argent que j'ai recu a la
maison. A present livrez-moi a la justice; j'ai tue mon sauveur, mon
maitre, mon Jesus! Envoyez-moi a la potence; vous voyez bien que je me
livre moi-meme. Monsieur l'abbe, priez pour moi!
ASTOLPHE.
Ah! lache, fanatique! je t'ecraserai sur le pave.
LE PRECEPTEUR.
Les revelations de ce malheureux seront importantes; epargnez-le, et ne
doutez pas que le prince ne prenne des demain l'initiative pour vous
accuser. Du courage, seigneur Astolphe! Vous devez a la memoire de celle
qui vous a aime, de purger votre honneur de ces calomnies.
ASTOLPHE, _se tordant les bras_.
Mon honneur! que m'importe mon honneur? _(Il se jette sur le corps de
Gabriel. Marc le repousse.)_
MARC.
Ah! laissez-la tranquille a present! C'est vous qui l'avez tuee.
ASTOLPHE, _se relevant avec egarement_.
Oui, c'est moi! oui, c'est moi! Qui ose dire le contraire? C'est moi qui
suis son assassin!
LE PRECEPTEUR.
Calmez-vous et venez! Il faut soustraire cette depouille sacree aux
outrages de la publicite. Le jour est loin de paraitre, emportons-la.
Nous la deposerons dans le premier couvent. Nous l'ensevelirons
nous-memes, et nous ne la quitterons que quand nous aurons cache dans le
sein de la terre ce secret qui lui fut si cher.
ASTOLPHE.
Oh! oui, qu'elle l'emporte dans la tombe, ce secret que j'ai voulu
violer!
LE PRECEPTEUR, _a Giglio_.
Suivez-nous, puisque vous eprouvez des remords salutaires. Je tacherai
de faire votre paix avec le ciel; et, si vous voulez faire des
revelations sinceres, on pourra vous sauver la vie.
G
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