tait phtisique, et son aine le soignait avec une sollicitude
admirable. Ils etaient orphelins. Henri etait une veritable mere pour le
pauvre agonisant. Il ne le quittait pas d'une heure, il lui faisait la
lecture, le promenait en le soutenant dans ses bras, le couchait et le
rhabillait comme un enfant, et, comme ce malheureux Ernest ne dormait
presque plus, Henri, pale, extenue, creuse par les veilles, semblait
presque aussi malade que lui.
"Une vieille femme excellente, proprietaire de notre maison et occupant
une partie du rez-de-chaussee, montrait beaucoup d'obligeance et de
devouement a ces malheureux jeunes gens; mais elle ne pouvait suffire
a tout, je dus m'empresser de la seconder. Je le fis avec zele et sans
m'epargner, comme vous l'eussiez fait a ma place, Rose; et meme dans les
derniers jours de l'existence d'Ernest, je ne quittai guere son chevet.
Il me temoignait une affection et une reconnaissance bien touchantes. Ne
connaissant pas et ne sentant plus la gravite de son mal, il mourut sans
s'en apercevoir, et presque en parlant. Il venait de me dire que je
l'avais gueri, lorsque sa respiration s'arreta et que sa main se glaca
dans les miennes.
La douleur d'Henri fut profonde, il en tomba malade, et, a son tour, il
fallut le soigner et le veiller. La vieille proprietaire, madame Joly,
etait au bout de ses forces. Edouard heureusement etait bien portant, et
je pouvais partager mes soins entre lui et Henri. Le devoir d'assister
et de consoler ce pauvre Henri retomba sur moi seule, et a la fin de
l'automne, j'eus la joie de l'avoir rendu a la vie.
"Vous concevez bien, Rose, qu'une amitie profonde, inalterable, s'etait
cimentee entre nous deux au milieu de toutes ces douleurs et de tous ces
dangers. Quand l'hiver et l'insistance de mes parents me forcerent de
retourner a Paris, nous nous etions fait une si douce habitude de lire,
de causer, et de nous promener ensemble dans le petit jardin, que notre
separation fut un veritable dechirement de coeur. Nous n'osames pourtant
nous promettre de nous retrouver a Montmorency l'annee suivante. Nous
etions encore timides l'un avec l'autre, et nous aurions tremble de
donner le nom d'amour a cette affection.
"Henri n'avait guere songe a s'enquerir de ma condition, ni moi de la
sienne. Nous faisions a peu pres la meme depense dans la maison. Il
m'avait demande la permission de me voir a Paris; mais quand je lui
donnai mon adresse chez ma belle-mere, a l'hotel de Blanc
|