lles que lady
Cappadoce permettait, et ce que lady Cappadoce permet n'est pas tres
etendu. Je n'ai jamais ete au theatre. Dans la musique seule, j'ai eu et
j'ai liberte complete. Voila pourquoi je l'ai aimee; non seulement pour
les distractions presentes, pour les sensations qu'elle me donnait, mais
encore pour les ailes qu'elle mettait a mes reveries... quelquefois
lourdes... et tristes.
Il lui prit la main et affectueusement, tendrement, il la lui serra:
--Pauvre enfant! dit-il.
--Je ne me plains pas, mon oncle, et si j'avais des plaintes a former,
je ne les adresserais certainement pas a vous, qui avez toujours ete si
bon pour moi.
--Ce que tu dis des tristesses de tes annees d'enfance, je me le suis
dit moi-meme bien souvent, mais sans trouver le moyen de les adoucir.
C'est le malheur de ta destinee que tu sois restee orpheline si jeune,
sans frere, ni soeur, n'ayant pour proche parent qu'un oncle qui
ne pouvait etre ni un pere ni une mere pour toi! Heureusement ces
tristesses vont s'evanouir puisque te voila au moment de faire ta vie et
de trouver dans celle que tu choisiras les affections et les tendresses
qui ont manque a ton enfance.
--Vous voulez me marier? s'ecria-t-elle.
--Non; je veux que tu te maries toi-meme, et pour cela je demande qu'a
partir d'aujourd'hui, quand tu mettras comme tu dis des ailes a ta
reverie, ce ne soit pas pour te perdre dans les fantaisies que la
musique pouvait suggerer a ton imagination enfantine, mais pour suivre
les pensees serieuses que le mariage fait naitre dans l'esprit et le
coeur d'une fille de dix-huit ans.
--Vous avez quelqu'un en vue?
--Oui.
--Quelqu'un qui m'a demandee?
--Non; mais quelqu'un qui serait heureux de devenir ton mari, je le
sais.
--Qui, mon oncle, qui?
--Je ne veux pas prononcer de nom; si je t'en dis un, tu partiras
la-dessus, tu n'auras plus ta liberte; cherche dans notre monde qui tu
accepterais pour mari, et aussi qui peut pretendre a ta main; quelqu'un
que tu connais, au moins pour l'avoir vu; quand tu auras fait cet
examen, nous en reparlerons.
--Quel jour? demain?
--Non, non, pas demain?
--Alors, apres-demain?
--Eh bien! oui, apres-demain! tu viendras pour travailler avec Casparis,
je dinerai avec toi, et tu te confesseras. Je suis heureux de voir a ton
impatience que tu n'es pas retive a l'idee de mariage.
III
Malgre le trouble que lui avaient cause les paroles de son oncle,
Ghislaine n'oublia pas la f
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