aroles que vous pretez a Sa Majeste ont pour moi une
importance de vie ou de mort. Me jurez-vous que la reine s'est bien
exprimee ainsi, en parlant de moi?
--Je vous le jure! dit Maurevert, avec une evidente sincerite. Je dois
meme ajouter que, si les paroles de la reine etaient affectueuses, le
ton l'etait plus encore. Ce n'est un secret pour personne, monsieur
le comte, que vous etes fort avant dans les faveurs de Sa Majeste, et
qu'elle vous destine un haut commandement dans l'armee que M. l'amiral
va conduire aux Pays-Bas."
Un soupir, qui ressemblait a un rugissement, gonfla la poitrine de
Marillac.
"Ma mere! ma mere! balbutia-t-il au fond de lui-meme. Serait-ce donc
vrai? Me serais-je donc trompe?..."
--Monsieur de Maurevert, reprit-il tout haut, je regrette de vous avoir
mal accueilli.
--Tout le monde s'y fut trompe, monsieur le comte!
--Adieu donc et merci. Veuillez, je vous prie, me conduire a M. de
Pardaillan, afin que nous partions ensemble.
--Monsieur le comte, je vous le repete: vous etes libre. Mais, quant
a M. de Pardaillan, c'est autre chose, vu que M. de Pardaillan est
rebelle, accuse de lese-majeste et que c'est mon devoir de l'arreter.
--Vous l'arretez?
--C'est fait.
--De quel droit? Etes-vous donc officier des gardes?
--Non, monsieur. J'ai simplement recu un ordre d'avoir a me saisir de la
personne de M. de Pardaillan, et j'etais justement a sa recherche, quand
j'ai eu l'honneur de vous rencontrer.
--Un ordre! gronda Marillac. De qui?
--De la reine mere!
Sur ce mot, Maurevert, saluant une derniere fois le comte, sortit,
laissant la porte ouverte. Marillac demeura un moment tout etourdi. Mais
bientot, se frappant le front, il murmura:
"Cette fois, je vais voir quelle peut etre l'affection de la reine pour
moi!..."
Marillac sortit de la cellule et se trouva dans un couloir en presence
d'un moine, qui le salua et lui dit:
--Monsieur le comte, je suis charge de vous faire sortir du couvent par
une porte de derriere.
--Pourquoi pas par la grande porte?
--Ecoutez, monsieur, fit le moine en souriant.
Marillac ecouta. Au loin, vers la rue, il entendit une rumeur furieuse.
"Cela, reprit le moine, c'est la voix du peuple qui reclame sa victime.
Et sa victime, c'est vous. Mais nous savons trop quelle serait la
douleur de notre grande reine, s'il vous arrivait malheur... Venez donc,
monsieur."
Marillac, sans plus d'observations, suivit le moine, qui le conduisit
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