es les plumes des pamphletaires
et des libellistes. Mais il faut bien du temps et de la philosophie a un
gouvernement pour qu'il admette ces verites. Il n'etait peut-etre pas
temps pour la convention de les entendre. Le directoire, qui etait plus
tranquille et plus assis, aurait du commencer a les comprendre et a les
pratiquer.
Les dernieres mesures du directoire, telles que la cloture de la societe
du Pantheon, le refus d'accepter la demission du ministre Benezech,
le rappel des conventionnels en mission, le changement de certains
fonctionnaires, produisirent le meilleur effet; elles rassurerent ceux
qui craignaient veritablement la terreur, condamnerent au silence ceux
qui affectaient de la craindre, et satisfirent les esprits sages qui
voulaient que le gouvernement se placat au-dessus de tous les partis. La
suite, l'activite des travaux du directoire, ne contribuerent pas moins
que tout le reste a lui concilier l'estime. On commencait a esperer le
repos et a supposer de la duree au regime actuel. Les cinq directeurs
s'etaient entoures d'un certain appareil. Barras, homme de plaisir,
faisait les honneurs du Luxembourg. C'est lui, en quelque sorte, qui
representait pour ses collegues. La societe avait a peu pres le meme
aspect que l'annee precedente; elle presentait un melange singulier
de conditions, une grande liberte de moeurs, un gout effrene pour les
plaisirs, un luxe extraordinaire. Les salons du directeur etaient pleins
de generaux dont l'education et la fortune s'etaient faites en deux ans,
de fournisseurs et de gens d'affaires qui s'etaient enrichis par les
speculations et les rapines, d'exiles qui rentraient et cherchaient a se
rattacher au gouvernement, d'hommes a grands talens, qui, commencant a
croire a la republique, desiraient y prendre place, d'intrigans enfin
qui couraient apres la faveur. Des femmes de toute origine venaient
deployer leurs charmes dans ces salons, et user de leur influence, dans
un moment ou tout etait a demander et a obtenir. Si quelquefois les
manieres manquaient de cette decence et de cette dignite dont on fait
tant de cas en France, et qui sont le fruit d'une societe polie,
tranquille et exclusive, il y regnait une extreme liberte d'esprit, et
cette grande abondance d'idees positives que suggerent la vue et la
pratique des grandes choses. Les hommes qui composaient cette societe
etaient affranchis de toute espece de routine; ils ne repetaient pas
d'insignifiantes traditions; ce q
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