pportait toujours a
Blois une mode, un secret, un parfum; c'est que Malicorne ne
demandait jamais un rendez-vous, et, tout au contraire, se faisait
supplier pour recevoir des faveurs qu'il brulait d'obtenir. De son
cote, Montalais n'etait pas avare d'histoires. Par elle, Malicorne
savait tout ce qui se passait chez Madame douairiere, et il en
faisait a Manicamp des contes a mourir de rire, que celui-ci, par
paresse, portait tout faits a M. de Guiche, qui les portait a
Monsieur. Voila en deux mots quelle etait la trame de petits
interets et de petites conspirations qui unissait Blois a Orleans
et Orleans a Paris, et qui allait amener dans cette derniere
ville, ou elle devait produire une si grande revolution, la pauvre
petite La Valliere, qui etait bien loin de se douter, en s'en
retournant toute joyeuse au bras de sa mere, a quel etrange avenir
elle etait reservee.
Quant au bonhomme Malicorne, nous voulons parler du syndic
d'Orleans, il ne voyait pas plus clair dans le present que les
autres dans l'avenir, et ne se doutait guere, en promenant tous
les jours, de trois a cinq heures, apres son diner, sur la place
Sainte-Catherine, son habit gris taille sous Louis XIII et ses
souliers de drap a grosses bouffettes, que c'etait lui qui payait
tous ces eclats de rire, tous ces baisers furtifs, tous ces
chuchotements, toute cette rubanerie et tous ces projets souffles
qui faisaient une chaine de quarante cinq lieues du palais de
Blois au Palais-Royal.
Chapitre LXXX -- Manicamp et Malicorne
Donc, Malicorne partit, comme nous l'avons dit, et alla trouver
son ami Manicamp, en retraite momentanee dans la ville d'Orleans.
C'etait juste au moment ou ce jeune seigneur s'occupait de vendre
le dernier habit un peu propre qui lui restat.
Il avait, quinze jours auparavant, tire du comte de Guiche cent
pistoles, les seules qui pussent l'aider a se mettre en campagne,
pour aller au-devant de Madame, qui arrivait au Havre.
Il avait tire de Malicorne, trois jours auparavant, cinquante
pistoles, prix du brevet obtenu pour Montalais.
Il ne s'attendait donc plus a rien, ayant epuise toutes les
ressources, sinon a vendre un bel habit de drap et de satin, tout
brode et passemente d'or, qui avait fait l'admiration de la cour.
Mais, pour etre en mesure de vendre cet habit, le dernier qui lui
restat, comme nous avons ete force de l'avouer au lecteur,
Manicamp avait ete oblige de prendre le lit.
Plus de feu, plus d'argent de p
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