et seraient bannis
ensuite a perpetuite. Leurs biens, provisoirement sequestres, devaient etre
partages aux patriotes indigens, dont la liste serait dressee par les
communes[16]. C'etait, comme on le voit, la loi agraire appliquee contre
les suspects au profit des patriotes. Ces decrets, imagines par Saint-Just,
etaient destines a repondre aux _ultra-revolutionnaires_, et a conserver au
comite sa reputation d'energie.
Pendant ce temps, les conjures s'agitaient avec plus de violence que
jamais. Rien ne prouve que leurs projets fussent bien arretes, ni qu'ils
eussent mis Pache et la commune dans leur complot. Mais ils s'y prenaient
comme avant le 31 mai; ils soulevaient les societes populaires, les
cordeliers, les sections; ils repandaient des bruits menacans, et
cherchaient a profiter des troubles qu'excitait la disette, chaque jour
plus grande et plus sentie.
Tout a coup on vit paraitre, dans les halles et les marches, des affiches,
des pamphlets, annoncant que la convention etait la cause de tous les maux
du peuple, et qu'il fallait en arracher la faction dangereuse qui voulait
renouveler les brissotins et leur funeste systeme. Quelques-uns meme de ces
ecrits portaient que la convention tout entiere devait etre renouvelee,
qu'on devait choisir un chef, et organiser le pouvoir executif, etc....
Toutes les idees, en un mot, qu'avaient roulees dans leur tete, Vincent,
Ronsin, Hebert, remplissaient ces ecrits, et semblaient trahir leur
origine. En meme temps, on vit les _epauletiers_, plus turbulens et plus
fiers que jamais, menacer hautement d'aller egorger dans les prisons les
ennemis que la convention corrompue s'obstinait a epargner. Ils disaient
que beaucoup de patriotes se trouvaient injustement confondus dans les
prisons avec les aristocrates, mais qu'on allait faire le triage de ces
patriotes, et qu'on leur donnerait a la fois la liberte et des armes.
Ronsin, en grand costume de general de l'armee revolutionnaire, avec une
echarpe tricolore, une houppe rouge, et entoure de quelques-uns de ses
officiers, parcourait les prisons, se faisait montrer les ecrous, et
formait des listes.
On etait au 15 ventose. La section Marat, presidee par Momoro, s'assemble,
et, indignee, dit-elle, des machinations des ennemis du peuple, elle
declare en masse qu'elle est debout, qu'elle va voiler le tableau de la
declaration des droits, et qu'elle restera dans cet etat jusqu'a ce que les
subsistances et la liberte soient assurees a
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