fin
savaient que Danton, dans son projet de faire renouveler le comite, croyait
ne devoir conserver que Robespierre. Ils entourerent donc celui-ci, et
n'eurent pas de grands efforts a faire pour lui arracher une determination
si agreable a son orgueil. On ne sait quelles explications amenerent cette
resolution, quel jour elle fut prise; mais tout a coup ils devinrent tous
menacans et mysterieux. Il ne fut plus question de leurs projets. A la
convention, aux Jacobins, ils garderent un silence absolu. Mais des bruits
sinistres se repandirent sourdement. On dit que Danton, Camille,
Philippeau, Lacroix, allaient etre immoles a l'autorite de leurs collegues.
Des amis communs de Danton et de Robespierre, effrayes de ces bruits, et
voyant qu'apres un tel acte il n'y avait plus une seule tete qui dut etre
en securite, que Robespierre lui-meme ne devait pas etre tranquille,
voulurent rapprocher Robespierre et Danton, et les engagerent a
s'expliquer. Robespierre, se renfermant dans un silence obstine, refusa de
repondre a ces ouvertures, et garda une reserve farouche. Comme on lui
parlait de l'ancienne amitie qu'il avait temoignee a Danton, il repondit
hypocritement qu'il ne pouvait rien, ni pour ni contre son collegue; que la
justice etait la pour defendre l'innocence; que pour lui, sa vie entiere
avait ete un sacrifice continuel de ses affections a la patrie; et que si
son ami etait coupable, il le sacrifierait a regret, mais il le
sacrifierait comme tous les autres a la republique.
On vit bien que c'en etait fait, que cet hypocrite rival ne voulait prendre
aucun engagement envers Danton, et qu'il se reservait la liberte de le
livrer a ses collegues. En effet, le bruit des prochaines arrestations
acquit plus de consistance. Les amis de Danton l'entouraient, le pressaient
de sortir de son espece de sommeil, de secouer sa paresse, et de montrer
enfin ce front revolutionnaire qui ne s'etait jamais montre en vain dans
l'orage. "Je le sais, disait Danton, ils veulent m'arreter!... Mais non,
ajoutait-il, ils n'oseront pas...." D'ailleurs, que pouvait-il faire? Fuir
etait impossible. Quel pays voudrait donner asile a ce revolutionnaire
formidable? Devait-il autoriser par sa fuite toutes les calomnies de ses
ennemis? et puis, il aimait son pays. "Emporte-t-on, s'ecriait-il, sa
patrie _a la semelle de ses souliers_?" D'autre part, demeurant en France,
il lui restait peu de moyens a employer. Les cordeliers appartenaient aux
_ultra-revol
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