tibles des
Mongols; quand, apres avoir perdu son toit et tout abri, l'homme
se refugia dans le courage du desespoir; quand sur les ruines
fumantes de sa demeure, en presence d'ennemis voisins et
implacables, il osa se rebatir une maison, connaissant le danger,
mais s'habituant a le regarder en face; quand enfin le genie
pacifique des Slaves s'enflamma d'une ardeur guerriere et donna
naissance a cet elan desordonne de la nature russe qui fut la
societe cosaque (_kasatchestvo_). Alors tous les abords des
rivieres, tous les gues, tous les defiles dans les marais, se
couvrirent de Cosaques que personne n'eut pu compter, et leurs
hardis envoyes purent repondre au sultan qui desirait connaitre
leur nombre: "Qui le sait? Chez nous, dans la steppe, a chaque
bout de champ, un Cosaque." Ce fut une explosion de la force russe
que firent jaillir de la poitrine du peuple les coups repetes du
malheur. Au lieu des anciens _oudely_[8], au lieu des petites
villes peuplees de vassaux chasseurs, que se disputaient et se
vendaient les petits princes, apparurent des bourgades fortifiees,
des _koureny_[9] lies entre eux par le sentiment du danger commun
et la haine des envahisseurs paiens. L'histoire nous apprend
comment les luttes perpetuelles des Cosaques sauverent l'Europe
occidentale de l'invasion des sauvages hordes asiatiques qui
menacaient de l'inonder. Les rois de Pologne qui devinrent, au
lieu des princes depossedes, les maitres de ces vastes etendues de
terre, maitres, il est vrai, eloignes et faibles, comprirent
l'importance des Cosaques et le profit qu'ils pouvaient tirer de
leurs dispositions guerrieres. Ils s'efforcerent de les developper
encore. Les _hetmans_, elus par les Cosaques eux-memes et dans
leur sein, transformerent les _koureny_ en _polk_[10] reguliers. Ce
n'etait pas une armee rassemblee et permanente; mais, dans le cas
de guerre ou de mouvement general, en huit jours au plus, tous
etaient reunis. Chacun se rendait a l'appel, a cheval et en armes,
ne recevant pour toute solde du roi qu'un ducat par tete. En
quinze jours, il se rassemblait une telle armee, qu'a coup sur nul
recrutement n'eut pu en former une semblable. La guerre finie,
chaque soldat regagnait ses champs, sur les bords du Dniepr,
s'occupait de peche, de chasse ou de petit commerce, brassait de
la biere, et jouissait de la liberte. Il n'y avait pas de metier
qu'un Cosaque ne sut faire: distiller de l'eau-de-vie, charpenter
un chariot, fabriquer de la
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