acer une
statue ou plutot un groupe qui se composait de trois figures adossees,
et parfaitement semblables de visage, pour exprimer l'unite de nature de
la trinite des personnes. Cette statue se voyait encore en ce lieu il
n'y a guere plus d'un demi-siecle. Les trois personnes divines etaient
sculptees dans une seule pierre, avec la figure humaine. Le Pere etait
place au milieu, vetu d'une robe longue; une etole suspendue a son cou
et croisee sur sa poitrine etait attachee a la ceinture. Un manteau
couvrait ses epaules et s'etendait de chaque cote aux deux autres
personnes. A l'agrafe du manteau pendait une bande doree portant ces
mots ecrits: _Filius meus es tu_. A la droite du Pere, le Fils, avec une
robe semblable, mais sans la ceinture, avait dans ses mains la croix
posee sur sa poitrine, et a gauche une bande avec ces paroles: _Pater
meus es tu_. Du meme cote, le Saint-Esprit, vetu encore d'une robe
pareille, tenait les mains croisees sur son sein. Sa legende etait:
_Ego utriusque spiraculum_. Le Fils portait la couronne d'epines, le
Saint-Esprit une couronne d'olivier, le Pere la couronne fermee, et sa
main gauche tenait un globe: c'etaient les attributs de l'empire. Le
Fils et le Saint-Esprit regardaient le Pere qui seul etait chausse.
Cette image singuliere de la Trinite, cet embleme, unique, je crois,
dans sa forme, attestait assez combien l'esprit d'Abelard etait
profondement coupe de ce dogme fondamental. Cependant quand, en
s'agrandissant, l'etablissement des bords de l'Ardusson devint en
quelque sorte le monument de cette grace divine qui l'avait recueilli et
soulage dans ses miseres, comme c'etait le lien de la consolation, il
lui donna le nom du _Consolateur_ ou du _Paraclet_[141].
[Note 139: "Relictis et civitatibus et castellis." (_Ab. Op_., ep.
I, p. 23.)]
[Note 140: Luc, XVI, 3.--(_Ab. Op_., loc. cit., et ep. II, p. 43.)]
[Note 141: D. Gervaise qui ecrivait vers 1720, dit qu'en 1701, le
3 juin, Mme Catherine de la Rochefoucauld, abbesse du Paraclet, fit
retirer de la poussiere cette curieuse antiquite, pour la placer
solennellement dans le choeur des religieuses sur un piedestal de marbre
portant une inscription qui en faisait connaitre l'origine. Les auteurs
de l'_Histoire litteraire_, peu favorables a Gervaise, admettent le
fait. (_Vie d'Abel._, t. I, l. II, p. 229.--_Hist. litt._, t. XII, p.
95.) D'ailleurs l'auteur des _Annales benedictines_, qui parait avoir vu
la statue, en donne la descri
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