eilla, presque tous les
habits etaient couverts de frimas. Le dejeuner servit bien a ramener la
gaiete dans les esprits; il se composait de biscuits durs, viande en
boite et d'eau. La marche se continue encore aujourd'hui. Le paysage
est loin d'etre, beau et, en verite, il, faudrait qu'il le fut
extraordinairement pour faire oublier aux soldats leurs souffrances
physiques. Triste procession de la Fete-Dieu! On dirait plutot une
troupe de pieux pelerins, tous se dirigeant a travers un pays inconnu,
vers un lieu plus inconnu encore. Vers midi l'on fait la halte et
les tentes sont montees. Ou croyait trouver ici quantite de fleur et
d'avoine et il n'y a qu'une vingtaine de sacs de farine. On annonca aux
soldats que la fin de la campagne n'etait pas eloignee, il ne fallait
rien moins que cela pour relever le courage des troupes. Tous les coeurs
tressaillent d'allegresse a cette seule nouvelle. Le reste de la journee
est donne au repos. Le meme jour, la garnison du 65e, laissee a Fort
Pitt, quittait cet endroit pour rejoindre leurs freres. Le Lt.-Col.
Williams et une partie des Midland l'accompagnent. Ce detachement campe
au Lac aux Grenouilles et eleve une seconde croix a la memoire des
martyrs, a quelques arpents de la premiere.
[Illustration: LIEUTENANT ROBERT]
8 de juin.--Le beau temps continue. De bonne heure l'on se remet en
route. L'on arrete vers midi a la mission indienne de la Riviere aux
Castors, puis on va camper a quelques milles de la, au milieu d'un bois.
Cet endroit est parfaitement cache de tous cotes, et s'appelle la "Fuite
de l'Ours." Ici doit-on rester Dieu sait combien de temps; c'est l'avant
poste de l'armee. Jamais endroit ne fut plus propre a se derober a la
vue de l'ennemi et, cependant, on n'y avait pas ete une demi-heure,
qu'une bande innombrable d'ennemis inattendus fondit sur les soldats
epuises de fatigue: c'etaient les maringouins! Ils s'etaient rendus par
centaines, infatigables, insatiables, attaquant sans relache. Il n'y a
pas d'autre moyen de s'en defendre que de se renfermer sous les tentes
et de s'y enfumer comme des jambons. Pour sortir, on s'enveloppe la tete
avec de la mousseline et l'on se couvre les mains de gants epais.
9 de juin.--Beau temps. Les maringouins ont cesse les hostilites pendant
l'avant-midi, mais reviennent a la charge avec plus d'ardeur que jamais
dans l'apres-midi. Il fallut s'enfermer de nouveau. Le pere Legoff, qui
est missionnaire parmi les Montagnais depuis
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