fable des contes orientaux realisee par l'industrie humaine.
"Aux portes de la ville, nous fumes recus par le roi et toute la cour.
Le monarque descendit de cheval et vint me saluer, puis on me fit
entrer dans un edifice ou l'on proceda a ma toilette de ceremonie, que
le roi avait apportee dans un grand coffre de bois de cedre incruste
d'ivoire, porte par le plus beau et le plus pare de ses elephants;
mais comme j'eclipsai ce luxueux subalterne quand je parus dans mon
costume d'apparat! Aor commenca par me laver et me parfumer avec grand
soin, puis on me revetit de longues bandes ecarlates, tissees d'or et
de soie, qui se drapaient avec art autour de moi sans cacher la beaute
de mes formes et la blancheur sacree de mon pelage. On mit sur ma
tete une tiare en drap ecarlate ruisselante de gros diamants et de
merveilleux rubis, on ceignit mon front des neuf cercles de pierres
precieuses, ornement consacre qui conjure l'influence des mauvais
esprits. Entre mes yeux brillait un croissant de pierreries et une
plaque d'or ou se lisaient tous mes titres. Des glands d'argent du
plus beau travail furent suspendus a mes oreilles, des anneaux d'or
et d'emeraudes, saphirs et diamants, furent passes dans mes defenses,
dont la blancheur et le brillant attestaient ma jeunesse et ma purete.
Deux larges boucliers d'or massif couvrirent mes epaules, enfin un
coussin de pourpre fut place sur mon cou, et je vis avec joie que
mon cher Aor avait un sarong de soie blanche brochee d'argent,
des bracelets de bras et de jambes en or fin et un leger chale du
cachemire blanc le plus moelleux roule autour de la tete. Lui aussi
etait lave et parfume. Ses formes etaient plus fines et mieux modelees
que celles des Birmans, son teint etait plus sombre, ses yeux plus
beaux. Il etait jeune encore, et, quand je le vis recevoir pour me
conduire une baguette toute incrustee de perles fines et toute cerclee
de rubis, je fus fier de lui et l'enlacai avec amour. On voulut
lui presenter la legere echelle de bambou qui sert a escalader les
montures de mon espece et qu'on leur attache ensuite au flanc pour
etre a meme d'en descendre a volonte. Je repoussai cet embleme de
servitude, je me couchai et j'etendis ma tete de maniere que mon ami
put s'y asseoir sans rien deranger a ma parure, puis je me relevai si
fier et si imposant, que le roi lui-meme fut frappe de ma dignite, et
declara que jamais elephant sacre si noble et si beau n'avait atteste
et assure la pros
|