e son sabre;
il distribue des cadeaux sur la tete de l'un et sur celle de
l'autre; et, regardant toujours Ostap, il le voit luttant corps a
corps avec huit ennemis a la fois.
-- Ostap! Ostap! tiens ferme.
Mais, deja, Ostap a le dessous; deja, on lui a jete un _arkan_
autour de la gorge; deja on saisit, deja on garrotte Ostap.
-- Aie! Ostap, Ostap! criait Tarass en s'ouvrant un passage vers
lui, et en hachant comme du chou tout ce qui les separait; aie!
Ostap, Ostap!...
Mais, en ce moment, il fut frappe comme d'une lourde pierre; tout
tournoya devant ses yeux. Un instant brillerent, melees dans son
regard, des lances, la fumee du canon, les etincelles de la
mousqueterie et les branches d'arbres avec leurs feuilles. Il
tomba sur la terre comme un chene abattu, et un epais brouillard
couvrit ses yeux.
CHAPITRE X
-- Il parait que j'ai longtemps dormi, dit Tarass en s'eveillant
comme du penible sommeil d'un homme ivre, et en s'efforcant de
reconnaitre les objets qui l'entouraient.
Une terrible faiblesse avait brise ses membres. Il avait peine a
distinguer les murs et les angles d'une chambre inconnue. Enfin il
s'apercut que Tovkatch etait assis aupres de lui, et qu'il
paraissait attentif a chacune de ses respirations.
-- Oui, pensa Tovkatch; tu aurais bien pu t'endormir pour
l'eternite.
Mais il ne dit rien, le menaca du doigt et lui fit signe de se
taire.
-- Mais, dis-moi donc, ou suis-je, a present? reprit Tarass en
rassemblant ses esprits, et en cherchant a se rappeler le passe.
-- Tais-toi donc! s'ecria brusquement son camarade. Que veux-tu
donc savoir de plus? Ne vois-tu pas que tu es couvert de
blessures? Voici deux semaines que nous courons a cheval a perdre
haleine, et que la fievre et la chaleur te font divaguer. C'est la
premiere fois que tu as dormi tranquillement. Tais-toi donc, si tu
ne veux pas te faire de mal toi-meme.
Cependant Tarass s'efforcait toujours de mettre ordre a ses idees,
et de se souvenir du passe.
-- Mais j'ai donc ete pris et cerne par les Polonais?... Mais il
m'etait impossible de me faire jour a travers leurs rangs?...
-- Te tairas-tu encore une fois, fils de Satan, s'ecria Tovkatch
en colere, comme une bonne poussee a bout par les cris d'un enfant
gate. Qu'as-tu besoin de savoir de quelle maniere tu t'es sauve?
il suffit que tu sois sauve, il s'est trouve des amis qui ne t'ont
pas plante la; c'est assez. Il nous reste encore plus d'une nuit a
courir ensem
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