au, et laissez-moi Dubois; c'est
un garcon de confiance qui me sert bien, et que je veux garder. A propos,
il m'a dit, ce me semble, qu'il avoit ete a vous quelque temps?
DORANTE, _feignant un peu d'embarras_.
Il est vrai, Madame; il est fidele, mais peu exact. Rarement, au reste,
ces gens-la parlent-ils bien de ceux qu'ils ont servis. Ne me nuiroit-il
point dans votre esprit?
ARAMINTE, _negligemment_.
Celui-ci dit beaucoup de bien de vous, et voila tout. Que me veut monsieur
Remy?
SCENE II.
ARAMINTE, DORANTE, M. REMY.
M. REMY.
Madame, je suis votre tres humble serviteur. Je viens vous remercier de la
bonte que vous avez eue de prendre mon neveu a ma recommandation.
ARAMINTE.
Je n'ai pas hesite, comme vous l'avez vu.
M. REMY.
Je vous rends mille graces. Ne m'aviez-vous pas dit qu'on vous en offroit
un autre?
ARAMINTE.
Oui, Monsieur.
M. REMY.
Tant mieux, car je viens vous demander celui-ci pour une affaire
d'importance.
DORANTE, _d'un air de refus_.
Et d'ou vient,[75] Monsieur?
M. REMY.
Patience!
ARAMINTE.
Mais, monsieur Remy, ceci est un peu vif; vous prenez assez mal votre
temps, et j'ai refuse l'autre personne.
DORANTE.
Pour moi, je ne sortirai jamais de chez Madame qu'elle ne me congedie.
M. REMY, _brusquement_.
Vous ne savez ce que vous dites. Il faut pourtant sortir; vous allez voir.
Tenez, Madame, jugez-en vous-meme; voici de quoi il est question: c'est
une dame de trente-cinq ans, qu'on dit jolie femme, estimable, et de
quelque distinction; qui ne declare pas son nom; qui dit que j'ai ete son
procureur; qui a quinze mille livres de rente pour le moins, ce qu'elle
prouvera; qui a vu Monsieur chez moi, qui lui a parle, qui sait qu'il n'a
pas de bien, et qui offre de l'epouser sans delai; et la personne qui est
venue chez moi de sa part doit revenir tantot pour savoir la reponse et
vous mener tout de suite chez elle. Cela est-il net? Y a-t-il a se
consulter la-dessus? Dans deux heures il faut etre au logis. Ai-je tort,
Madame?
ARAMINTE, _froidement_.
C'est a lui de repondre.
M. REMY.
Eh bien! A quoi pense-t-il donc? Viendrez-vous?
DORANTE.
Non, Monsieur, je ne suis pas dans cette disposition-la.
M. REMY.
Hum! Quoi? Entendez-vous ce que je vous dis, qu'elle a quinze mille livres
de rente, entendez-vous?
DORANTE.
Oui, Monsieur; mais, en eut-elle vingt fois davantage, je ne l'epouserois
pas; nous ne serions heureux ni l'un ni
|