ntin,
elle entra dans un magasin ou, a cote du jais et du grenat, se
trouvaient exposees des pierreries et des perles fausses.
Bien qu'elle eut prepare ses premieres paroles, elle eprouva un moment
d'hesitation confuse avant de pouvoir s'expliquer: on ne savait pas qui
elle etait, elle en avait la presque certitude, mais enfin on ne pouvait
pas ne pas s'etonner de sa commande et ne pas chercher a deviner ce qui
se cachait derriere.
Enfin elle se decida:
--Pouvez-vous, dans un collier, remplacer les perles vraies qui le
composent par des perles fausses sans que cette substitution saute aux
yeux?
--Saute aux yeux! Mais, madame, nous pouvons arriver a une imitation si
parfaite que personne ne s'apercevra que c'est une imitation. Tenez.
Ouvrant un tiroir, le bijoutier etala sur une vitrine une poignee de
perles:
--Voyez vous-meme.
Ce que vit Ghislaine, ce fut que ces perles n'avaient pas l'orient doux,
chatoyant, satine des vraies, mais enfin l'imitation etait suffisante
pour qu'elle s'en contentat.
--Ou est le collier? demanda le bijoutier.
--Je l'apporterai demain: vous le copierez aussi exactement que
possible, meme nombre, il y en a quatre cents...
Le bijoutier eut un sourire de surprise.
--... Meme grosseur; vous ferez servir l'ancien fermoir pour attacher
ces perles fausses, et vous mettrez les vraies dans une boite.
Lorsqu'elle revint le lendemain, apportant le collier, ce ne fut plus de
la surprise que montra le bijoutier, ce fut du respect; mais il ne se
laissa pas effrayer par la perfection de ces perles, et il declara que
la copie serait digne du modele.
--Ce sera une oeuvre d'art, je vous le promets, et si vous ne laissez
pas un curieux indiscret mordre mes perles, ce qui ne se fait pas dans
le monde de madame, j'en suis sur, vous pourrez porter votre collier
avec pleine securite.
--Qu'appelez-vous mordre vos perles? demanda Ghislaine surprise.
--J'entends les mordre avec les dents, ce qui est un moyen a la portee
de tout le monde de s'assurer que les perles sont vraies, les fausses
n'ayant pas la solidite des vraies.
On lui demandait quinze jours pour ce travail, elle n'en put donner que
six; le samedi, a trois heures precises, il fallait qu'on le lui livrat.
Et en effet, quand elle arriva le samedi, elle trouva le collier faux
dans son ecrin, et dans une boite les perles vraies. Le bijoutier aurait
voulu qu'elle admirat longuement "son oeuvre d'art"; mais elle n'en
avait
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